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Christian Bonnet, un trésor vivant

Ils étaient encore 200 à l'aube du XXe siècle, cependant le nombre d'artisans écaillistes se réduit comme une peau de chagrin. On les compte désormais à peine sur les doigts d'une main. Elevé au rang de Maître d'Art par le Ministre de la Culture en 2000, Christian Bonnet, héritier de trois générations d'écaillistes, se place désormais de toute évidence au rang des monuments du patrimoine immatériel français à l'instar des "trésors vivants" du Japon. Par conséquent, si l'écaille signifie pour vous une énième teinte du plastique, il est grand temps de (re)découvrir les merveilles d'un art ancestral où la rareté d'un matériau noble et naturel côtoie les possibilités infinies de teintes blondes ou dorées jusqu'aux sombres écailles noires...

Eloge de la rareté


Quand on sait que seule une tortue sur mille peut espérer atteindre la plénitude de l'âge adulte et que, pour un animal de cent kilos et d'un mètre d'envergure, moins de deux kilos d'écaille s'avèrent au final utilisables, on comprend mieux pourquoi cette matière pure et vivante aux reflets miroitants fascinait déjà Virgile et Ovide. Des stocks très sensiblement inférieurs à ceux de l'ivoire, une interdiction portant sur l'importation, il n'en faut pas davantage pour créer un mythe. De fait, parler de passion à l'endroit de Christian Bonnet, l'un des derniers écaillistes de France, semble donc pour le moins restrictif. Chez les Bonnet, on est écailliste de père en fils et ce savoir-faire jalousement gardé (le maître d'art est actuellement l'unique héritier du précieux secret, du stock et de l'outillage) ne sera transmis qu'au jeune élève, Daniel Bernard. En bref imaginez un monde où seul Louis Vuitton saurait fabriquer des sacs ! Une connaissance indéniablement en or pour un homme considéré comme un "trésor vivant".



Intemporelle écaille

Lunettes, objets de parure ou décoration, l'écaille soudée, tournée, sculptée, façonnée permet de réaliser de véritables dentelles dans une symphonie de teintes chaudes et harmonieuses. Loin d'une industrie du plastique qui en a peu à peu détourné l'authenticité, l'écaille joue la carte de l'éternité, de l'intemporalité sans rien sacrifier à la créativité. Les pièces sont évidemment réalisées à la main et sur mesure selon des techniques ancestrales (notamment l'étonnante autogreffe) le tout dans le plus grand respect du cycle naturel des tortues de mer. Un luxe de la rareté, de l'art et du savoir-faire savamment orchestré par une famille gardienne de la mémoire des métiers de l'écaille. Des monuments à visiter sans plus attendre !
Août 2006
Par Katya PELLEGRINO
Maison Bonnet
8, rue Tiphaine
75015 Paris
Tel : + 33 (0) 1 40 59 45 14
www.maisonbonnet.com