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Le "luxe absolu" de Chanel à Ginza

Les grandes marques françaises et européennes du luxe ouvrent l'une après l'autre immeubles et boutiques dans les lieux les plus huppés du Japon.
Il y a peu c'était Dior qui voyait Bernard Arnault inaugurer sa boutique à Ginza le quartier mythique du luxe à Tokyo et samedi dernier c'était Chanel qui à son tour ouvrait sa plus grande boutique du monde dans l'avenue la plus chère de la planète.
Quelque 200 fidèles et curieuses ont patiemment attendu l'ouverture de l'immeuble de dix étages qui côtoie désormais à Ginza d'autres représentants de l'industrie française de la mode et du luxe: Christian Dior, Cartier, Hermès et Louis Vuitton.
"Une première au monde"

Cette immense boutique, la plus grande jamais ouverte par Chanel dans le monde est située dans un nouvel immeuble qui domine Chuo-dori, la principale avenue de Ginza. Imaginé par l'architecte américain Peter Marino, le bâtiment de dix étages s'inspire du motif du tweed caractéristique de la maison de couture. En effet, la façade, qui a été acheminée par bateau, est décorée d'une multitude de logos de la marque et est constituée d'une double paroi de verre enchassant un nid d'abeille en aluminium rappelant le matelassage des sacs Chanel.
A l'intérieur de cette structure sont disposées 700.000 diodes électroluminescentes commandées par ordinateur qui permettent à la façade de se transformer en écran géant d'ordinateur où les diodes jouent le rôle de pixels. On peut y programmer, en noir et blanc, les créations de Karl Lagerfeld ou tout autre vidéo de la marque. Elle est animée de la tombée de la nuit à une heure du matin. Selon Richard Collasse, le pdg de Chanel-Japon, "c'est une première au monde."

"On a pris le parti du luxe absolu"

"On a pris le parti du luxe absolu. L'avenir du luxe au Japon, c'est beaucoup plus de luxe", a-t-il encore confié à l'AFP. On peut le croire lorsqu'on considère que l'ensemble de cette boutique de 1.300 m2 répartis sur trois étages a coûté 240 millions de dollars - dont 170 pour le seul terrain. Une somme qui devrait être amortie en quatre ou cinq ans selon les estimations de la grande marque française de luxe qui dispose désormais au Japon, où elle s'est implantée il y a 25 ans, de quatre boutiques en propre (trois à Tokyo et une à Osaka) et 32 points de vente en grands magasins.
Il semble en effet que dans l'Archipel japonais le luxe retrouve sa place en réalisant le quart des ventes mondiales de l'industrie, soit près de 12 milliards de dollars par an.
L'enthousiasme des japonais s'est d'ailleurs manifesté à l'ouverture des portes par un accueil de Karl Lagerfeld, digne de celui d'une star du rock : “Il n'y a pas besoin de musique pour être célèbre aujourd'hui" a déclaré "Lagerfeld-san" au milieu de la masse de fans qui le pressait en essayant de le photographier avec leurs téléphones portables...
Le couturier a d'ailleurs conçu une ligne de produits exclusifs pour la boutique.

Au sommet Alain ducasse ouvre le restaurant "Beige"

Les produits de la marque, sacs et accessoires, parfums et prêt-à-porter sont présentés à chaque étage selon un principe de marchandisage "vertical, tandis qu'au 4ème étage, le Nexus Hall accueillera cinquante fois par an, outre des défilés, des concerts de jazz et de musique classique. Par ailleurs des salons VIP, une galeries d'art, un parking sophistiqué en sous-sol de 22 places, un détail très important à Tokyo, sont également prévus pour recevoir luxueusement une clientèle exigeante.
les clients du magasins auront enfin l'occasion de bénéficier des services d'une autre vedette du luxe français : au 9ème étage de la tour Alain ducasse ouvre un restaurant d'une centaine de places baptisé "Beige" (couleur fétiche de Coco Chanel). A noter que "pianos", rôtissoires et nombre des éléments du décor ont été importés de France et que chaque fauteuil du restaurant est recouvert de tweed Chanel. Le tout est chapeauté au sommet d'une terrasse, "Le jardin de Tweed", pour permettre aux clients de se relaxer.
Le grand chef français y proposera "une vision contemporaine de la cuisine française, débarrassée des clichés trop formels".

L'enthousiasme manifesté par l'ouverture de ces boutiques de grand luxe témoigne bien que, si la Chine s'ouvre au luxe et attire toutes les grandes maisons, le Japon qui sort d'une longue stagnation économique, n'a pas perdu goût pour l'excellence et les produits de luxe, bien au contraire.
Décembre 2004
Par Yves CALMEJANE