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René Lalique : Portrait de l'artiste en joaillier

Curieuse histoire que celle de ce maître incontesté de l'art verrier mais dont le passé de bijoutier orfèvre est singulièrement tombé dans l'oubli. Pourtant considéré comme "l'inventeur du bijou moderne", René Lalique a exercé son génie créatif durant quelque 20 années, façonnant à lui seul une nouvelle acception de la joaillerie. Fort heureusement, le Musée du Luxembourg lui rend enfin hommage. L'occasion de re-découvrir 400 pièces devenues mythiques.
L'homme qui ornait les femmes

Sarah Bernhard, la marquise Arconati-Visconti, la comtesse de Béarn, la princesse de Guermantes, Mme Waldeck-Rousseau etc. : toutes ces personnalités de la Belle Epoque avaient vu juste en confiant leurs nobles gorges et poignets à l'artiste qui allait bientôt révolutionner le bijou. L'histoire commence en 1880, à tout juste vingt ans, René Lalique entre comme dessinateur de bijoux chez les joailliers du Palais-Royal. Très vite remarqué pour la qualité et l'inventivité de ses esquisses, il ne tarde pas à collaborer à l'Exposition Universelle de 1889 pour le compte de Vever et Boucheron, imposant d'ores et déjà son style et multipliant les commandes. Il faudra en revanche attendre 1900 pour le voir triompher, en son nom propre, à l'Exposition Universelle. Le petit monde du théâtre et de la scène politique s'arrachent alors ses créations follement néo-gothiques et fantaisistes. Un artiste est né.


De l'art nouveau à l'art déco

Il y a chez René Lalique quelque chose de profondément visionnaire à avoir osé, quelle indécence, abandonner les matériaux les plus précieux au profit de matières si peu usitées (émail, cuir, corne, nacre...) et de pierres semi-précieuses (agates, jades...) Ici le travail d'orfèvre prend tout son sens et se substitue, peu ou prou, à la valeur "faciale" des matériaux générant une nouvelle donne : le génie créatif dorénavant se monnaie. Des compositions des plus sophistiquées, étonnamment fines et volumineuses, voient dès lors le jour et bouleversent la silhouette féminine. La femme d'ailleurs, réinterprétée tantôt en nymphe, tantôt en elfe ou en cygne, anime constamment des créations inspirées du règne végétal où un curieux bestiaire semble prendre vie, consacrant une excentricité salvatrice et jubilatoire. Seulement la 1ère Guerre Mondiale finit de renvoyer au placard l'art nouveau et son cortège naturel coloré. L'artiste se tournera alors naturellement vers l'art déco délaissant le bijou pour le verre, renonçant à l'artisanal pour l'industrialisation. L'idée ? Inscrire le luxe dans le quotidien du plus grand nombre. Flacons de parfums, vases, chandeliers ou bouchons de radiateurs, les objets les plus usuels flirtent désormais avec savoir-faire et esthétisme.
La démocratisation du luxe est née !
Avril 2007
Par Estelle BURGET
René Lalique 1890 - 1912
Jusqu'au 29 juillet
Musée du Luxembourg
19, rue de Vaugirard
75006 Paris
Renseignements : 01 45 44 12 90

Entrée : 8 à 10 €
Du lundi au jeudi de 11 heures à 19 heures, le vendredi jusqu'à 22 heures, samedi, dimanche et jours fériés de 9 heures à 19 heures.