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La mode dans la machine à remonter le temps...

Les jupes raccourcissent drastiquement, les chaussures osent la plate-forme, les imprimés graphiques formatent des silhouettes sophistiquées... Ciel ! Assisterait-on au plus grand rapt du siècle ? En empruntant ses codes aux années 60, en singeant les années 70 tout en privant les années 80 de leur brutalité, la mode opère un savant mélange de genres. Jubilatoire !
Je copie donc je suis

Si la mode avait dû être changée en statue de sel pour sanctionner son regard immanquablement tourné vers le passé, probablement, en l'absence de tout code, aurions-nous renoué avec la nudité. Fort heureusement, rassurant des générations de créateurs, notre cher Goethe avait déjà avalisé le plagiat généralisé puisqu'il s'agissait pour le poète de "faire un meilleur avenir avec les éléments du passé". En 2007, la mode s'en donne donc à coeur joie. Sans scrupule, les créations s'approprient l'esprit d'hier et composent une mode dense et composite, entre matériaux nouveaux et lignes vintage.

Des années 60 aux années 80

Mini-jupes, mini-robes trapèze inspirées de Courrèges et chaussures plate-forme pour un look baby-doll, les années 60 font souffler un vent de liberté sur les collections. Lorgnant du côté des années 70 voire du début 80, les créateurs (Chanel, Pucci, Gucci et Roberto Cavalli en tête) réhabilitent l'esprit graphique, décomplexé. Les bottes, toujours hype cette année, composent des lignes éternellement rétro. Enfin le leggin et le jeans slim, tout droit sortis de la mouvance punk-new wave des années 80, n'ont pas fini de rendre hommage à Iggy Pop réinventant un style doucement rock. Conclusion, en jouant la carte du syncrétisme, la mode ancre un style strictement nouveau. Une forme de patchwork réjouissant et sophistiqué. C'est peut-être cela l'esprit des années 2000 ?

Déco : du kitch chic et... de l'humour

Les années 60 et 70 n'ont évidemment pas épargné notre intérieur. Sans complexe la déco flirte entre imprimés fleurs et fantaisies psychédéliques. Les meubles et les accessoire osent les courbes généreuses et les couleurs acidulées, tirant la langue à la dictature de l'épure. Un kitsch chic, non sans humour qui réinvente le bon goût éclairé en orchestrant avec art le décalage, la rupture voire l'outrance. Seul risque : la pérennité. Car si la mode, royaume de l'éphémère durable, peut s'autoriser un maximum de liberté, la décoration doit elle songer à traverser le temps, du moins quelques années. Une alchimie complexe et jouissive. Un art de la mesure dans la démesure.
EB
Mai 2007