Le Hammam: Voyage au pays des sens...
Nichée au pied des montagnes enneigées de l'Atlas entre désert et palmeraie, Marrakech la Perle du sud, avec son âme mi-berbère mi-africaine, surnommée la Ville Rouge, reste toujours le carrefour des modes et des voyageurs du monde entier. Pudique et ensorcelante comme une courtisane, elle recèle trésors et secrets qu'elle ne révèle qu'aux initiés. Cité rebelle au passé mouvementé, souvent courtisée au cours des siècles, elle a su préserver et conserver son mode de vie et ses traditions séculaires, malgré le tumulte du monde. Une des coutumes millénaires de ces peuples, qui depuis a franchi les frontières et les modes, reste le hammam. Temple de purification et de beauté né en Orient au IXème siècle, il reste un refuge ultime des femmes et des hommes, où l'hygiène devient un art de vivre tout simplement. Initiation.
Le hammam, l’antichambre de la mosquée
Au commencement, le hammam inspiré par les thermes romains et introduit en Orient au IXème siècle, jouait le rôle de purification, de préparation à la prière et d'apaisement du corps et de l'âme. Pour les hommes, le hammam était "l'antichambre de la mosquée" et leur permettait de réaffirmer leur appartenance à la communauté masculine et sociale ; pour les femmes, c'était un espace de ré-absorption dans un milieu féminin-maternel.
Le hammam fut introduit en Europe au XIIIème siècle à la suite des croisades et connut six étapes d'évolution entre le XIIème et le XXème siècles.
Lieu de rencontres ou d'échanges...
Sensualité, convivialité, plaisir et bien-être caractérisent ces pièces à vivre où plane un léger parfum d'antan.
Alliage unique entre charme et séduction, lieu de rencontres ou d'échanges, le hammam reste également un lieu de vie où le chuchotement se mêle au ruissellement de l'eau et se dissout dans les vapeurs d'eau. Secrets d'alcôve, le hammam est un endroit d'apprentissage, de don et de partage.
Le charme exceptionnel et la fascination de ce lieu restent le mystère qu'exercent l'eau et ses vapeurs, rehaussant chaque femme d'une ondée de douceur et de sensualité mais non d'érotisme. Il ne faut pas se méprendre. La nudité se veut discrète, parée d'un voile de pudeur.
Considéré comme un retour aux sources, le hammam est aussi une invitation à la méditation.
Aujourd’hui, l'esprit de bien-être se décline au quotidien et s'dresse également aux hommes.
Rituel
Les hammams se ressemblent et sont conçus avec une salle tiède et deux ou trois salles de chaleur progressive, selon le modèle maure.
Avant d’y pénétrer, commencez par prendre une bonne douche qui deviendra un rituel d'accès à la détente et initiera le corps à l'univers de l'eau.
La salle tiède
Après vous être dévêtu totalement, vous pénétrez dans la première pièce qui invite à la détente et à la relaxation, pour vous asseoir ou vous étendre sur un banc de pierre. La chaleur vous enveloppe agréablement.
Dans la pièce, ni trop chaude ni trop froide, le corps se détend avec volupté dans un cadre humide. Une chaleur saturée à 100% d'humidité favorise le relâchement du tonus musculaire. Ici, vous reprenez goût au calme, vous vous laissez envahir par une douce torpeur, vous vous écoutez, vous refaites connaissance avec vous-même, et surtout vous vous laissez envoûter par la simplicité intemporelle du lieu !
Les vapeurs parfumées à l'eucalyptus ou toute autre huile essentielle participent à la magie du moment. Il faut savoir que l'aromathérapie était déjà d'usage courant dans les thermes romains.
Le secret de la réussite d'un bon hammam réside dans le temps passé à laisser sa peau transpirer. Le but du hammam étant d'éliminer les toxines, de dénouer les tensions grâce à l'eau saturée en humidité.
La veille, comme au Maroc, vous aurez nourri votre corps à l'huile d'argan, au beurre de karité ou à toute autre huile nourrissante et enduit vos cheveux d'huile d'amande douce.
La salle chaude : torpeur et gommage
Après vous être laissé pénétrer par l'atmosphère chaude et humide et avoir transpiré au moins une demi-heure dans la salle tiède, vous passez dans la salle chaude, pour une durée maximale de cinq minutes. L'idéal est de rester un peu plus longtemps à chaque passage pour que le corps s'habitue. L'objectif n'est pas de transpirer mais de détendre et de nettoyer la peau.
L'humidité et la chaleur fatiguant, il faut vous laisser aller à la torpeur et vous alanguir.
Lorsque la peau est bien préparée, le soin peut commencer avec une friction tonique au "kassa", gant de crêpe marocain, granulé.
Ce gommage oxygène le cœur, active la circulation sanguine et déclenche une sudation importante. Rincé par la "Harza" (masseuse) et aspergé d'eau froide, vous êtes enduit de savon noir, frictionné, étrillé, jusqu'à ce que l'épiderme soit lisse et doux, débarrassé de ses cellules mortes.
Puis c'est le retour dans la salle tiède, où il faut prendre une douche ou encore s'asperger d'eau froide afin de resserrer les pores et activer la circulation sanguine.
L’important est de boire souvent, plusieurs verres d'eau ou de thé à la menthe pour se réhydrater.
Dernière étape, le massage, la façon la plus agréable de terminer son soin.
L'origine du terme "masser" vient d'ailleurs de l'arabe "mass" qui signifie "toucher de manière délicate".
Oint d'huiles aromatiques et de crèmes hydratantes sur le corps, le massage par le toucher complète agréablement le rituel. Point d'orgue du hammam, il rééquilibre les échanges et favorise la relation à l'autre.
Décembre 2008
Par Katya PELLEGRINO