Senso
I love London
C'était il y a cinq ans. Avec ce qu'il faut de conviction et d'insouciance, nous lancions SENSO et affichions de prime abord notre "anglopathie" en intitulant ce premier numéro So British! So Sexy!: le goût de l'Angleterre suppose celui de l'oxymore...
Depuis, pour l'agrément de nos lecteurs, nous avons beaucoup voyagé parmi les mots, les sens, les pays, afin de proposer en quelque sorte un "livre des merveilles" accompagné de son guide du consommateur. Nul n'a contesté la hauteur de cette ambition, à telle enseigne que SENSO demeure à ce jour plutôt singulier dans l'univers des magazines de langues françaises. Mais puisque nous entrons en somme dans notre deuxième lustre, il n'est pas anormal d'espèrer mieux encore. Aussi pour 2007 envisageons-nous un enrichissement de notre offre, tant au point de vue du magazine lui-même que de sa déclinaison sur d'autres supports, édition, radio, télévision, Internet. Nous y reviendrons en détail.
Pour l'heure, retour à notre chère Albion et sa capitale. Oui, elle nous séduit toujours comme elle attire à nouveau le monde, la vieille Angleterre si prompte à rajeunir. Souvent, nous avons célébré en ces pages l'Italie et les Etats-Unis; il nous a paru légitime et d'actualité de traverser à nouveau la Manche pour ce cinquième anniversaire. Nos collaborateurs conjuguent la métropole anglaise au passé et au présent. Traditions de l'Empire, des rythmes, du théâtre et du cinéma, des afternoon teas de toujours, rebaissance de la mode, d'une littérature riche de sa "mondialité", de la gastronomie, des quartiers quelquefois déclassés: Londres, avec New York et Hong-Kong, forme décidement une tricontinentale anglophone armée pour le siècle neuf. A ces déclinaisons documentées s'ajoutent deux suppléments qu'on ne trouvera nulle part ailleurs, un profil dépliant de Londres dû à notre compagnon de toujours, Alain Bouldouyre, et Arty London, un dossier sur Londres capitale européenne de l'art, composé par nos amis de la revue Beaux-Arts. Et pour la première fois dans SENSO, un roman-photo, mais oui, oeuvre de Romain Slocombe!
Pour finir, saluons le souvenir de Bernard Rapp, qui fut évidement du premier numéro de SENSO, tout d'anglophilie. En sa compagnie, l'un d'entre nous parcourut l'Angleterre pour évoquer ses écrivains devant des caméras, et composer un ouvrage de dilection. C'était un ami taciturne, il le demeure.
Noir c'est Noir
Mêmes causes, effets identiques. Tandis que nous "bouclons" ce numéro 17, une certitude s'insinue : le prochain SENSO sera le plus achevé, le plus séduisant, le plus "beau-intelligent-utile", selon cette devise que nous entendons illustrer depuis trois ans. Nous pensions bien qu'à nos lecteurs et à nous-mêmes, "le noir irait si bien". Le mot lui-même commence comme une négation, alors que la couleur qu'il exprime les assemble toutes, les exhausse, les illumine. Le noir, ferment dialectique : sans lui, que serait le blanc ?
Nous avions été frappés de ce que le noir implique d'emblée comme connections. Noir comme la nuit, le film, la bête, le trou, la musique, le raisin, l'œil, le tableau, l'humour, le marché, le blé, la marée, le chocolat, le blouson, le cafard, l'olive et tant d'autres référents. Noir, expression de vie autant que de mort. Splendeur du noir.
Ils allaient donc devoir dessiner le noir. Ben le premier bien sûr, qui a conçu avec l'esprit qu'on lui connaît cette couverture et les entrées de chapitre. Au fil des pages s'y sont superbement aventurés Serge Ricco, Philippe Bertrand, Marceline Truong, Walter Minus, Colonel Moutarde, tous compagnons de longue date de SENSO, accompagnés de nouveaux venus non moins talentueux, Jean-Claude Gotting, Chloé Poizat, Séverin Millet, Cécile Defforey et Valls.
Les textes ? Magnifiques, comme toujours, allions-nous ajouter. Mais quoi, telle est bien notre conviction. S'enchanter du sombre roman new-yorkais de Philippe Claudel, l'auteur du mémorable Les Âmes grises; des pages tenues haut de Jérôme Garcin sur le Cadre noir de Saumur et d'Henri Mitterand sur Zola ; du récit tout de pudeur émue d'Henri Lopes, romancier et diplomate congolais et français ; des variations expertes de Guillaume Durand sur le grand peintre américain de la monochromie Ad Reinhardt; des sensations à nu éprouvées par Philippe Besson au cours d'un dîner dans l'obscurité ; de la noirissime anticipation réaliste de Thierry Jonquet, exemplaire plume policière ; des voyages avertis de Gilles Leroy à Maastricht, de Jean-Pierre de Lucovich à Pigalle, de Patrice Bollon, essayiste esthète, dans l'univers vestimentaire du noir. Encore Elisabeth Barillé aux cheveux de jais retourne au parfum, en l'espèce couleur de nuit, Dominique Noguez à l'humour de même teinte, Alain Gerber au jazz en noir et blanc synonymes. Esprit du caviar, par Irène Frain, du smoking par Frédéric Beigbeder, du rock par Ariel Wizman, des villes illuminées par Claude Arnaud, des films noirs - l'expression est passée telle en anglais - par Patrick Brion, de Jean-Marie Le Clézio par Gérard de Cortanze.
Et nous ne serions pas les premiers émerveillés d'un tel sommaire ? Vous le serez aussi, nous n'en doutons pas.
Pirates
Pirates, corsaires, flibustiers, naufrageurs, boucaniers : la grand-voile est levée, le pavillon à tête de mort claque, la bataille s'annonce. Pas de quartier sur les mers chaudes du globe, de la Caraïbe ou de la Chine. À l'abordage ! Les pirates ont créé un genre littéraire illustré en premier lieu par le grand Robert Louis Stevenson, duquel a découlé un genre cinématographique où flamboient hier Errol Flynn, aujourd'hui Johnny Depp. Mais un univers aussi coloré génère également des modes vestimentaires et même un état d'esprit. C'est ce dernier que voudrait célébrer ce numéro de SENSO. "Pirate", l'adjectif, évoque une certaine marginalité quelque peu provocatrice, une façon d'être non alignée, à la limite du communément acceptable. Contournons les idées reçues !
Être pirate, c'est être ailleurs et autrement. Aussi sommes-nous partis au loin avec nos compagnons de voyage romanciers et peintres. Destinations au long cours, Australie et Turkménistan, et les îles forcément, Seychelles et Malte, l'île de la Tortue et la presqu'île de Quiberon.
Figures premières de la geste pirate, les écrivains Stevenson et Gilles Lapouge. À leur façon pirates aussi, dérangeurs bienvenus de la norme, le cuisinier Jamie Oliver ou le photographe Peter Beard, les musiciens Henri Crolla et Willy DeVille, et un prodigieux "assassin de voitures", l'aristocrate anglais Lord Brocket.
Comme toujours, nous avons sollicité les plumes dont nous admirons le style, à commencer par l'auteur de cette nouvelle couverture dessinée pour SENSO, le maître italien Milo Manara, l'Américain Miles Hyman ou le Français François Place...
Quant aux textes, ils sont l'œuvre de romanciers de notre famille élective, désormais attendus par nos lecteurs, Marc Lambron, Alain Gerber, Gérard de Cortanze, auxquels se joignent de nouveaux et brillants aventuriers de l'écriture. C'est avec beaucoup d'émotion que nous publions, pour la première fois, dans une parfaite nouvelle policière du très courtisé Bernard Werber, une lettre de l'autre hémisphère de Philippe Claudel, prix Renaudot 2003 pour son magnifique Les Ames grises, des réflexions sur la "piraterie" littéraire de Régis Jauffret, styliste exigeant et novateur, et de l'Iranienne Chahdortt Djavann, qui avec "Bas les voiles !" avait déjà su dire non, en français, à l'intégrisme.
Percy Kemp, auteur il n'y a guère de Musc, étonnant roman des parfums, et Emmanuel Pierrat, avocat des marges et des enfers livresques, précisent les nuances au sein des dynasties corsaires. Entre Stevenson et Michel Le Bris, c'est d'une complicité identitaire qu'il s'agit, d'une authentique amitié littéraire, que le second nous livre limpidement. Claude Chabrol va bientôt adapter l'intrigant et "chabrolien" roman de Serge Joncour "UV" : nous les avons tous deux sollicités, l'un à propos des films de pirates, l'autre pour une dégustation de rhum. Et c'est un écrivain français majeur, l'Haïtien René Depestre, qui évoque en poète l'île où s'assemblaient les forbans des mers.
Que de talents ! Nous nous autorisons un aveu : nous ne voyons pas d'autre magazine que SENSO pour en réunir autant.
Bonne traversée !
7 Péchés Capitaux
Une anthologie SENSO nous tentait depuis un moment.
D'abord nous avons songé à un livre qui rassemblerait certains de nos meilleurs articles selon un thème, comme les passions ou les ailleurs. Sans renoncer à cette idée, c'est vers ce particulier numéro 15 que nous nous sommes orientés. Autour des sept péchés capitaux, nous republions, en effet, quelques textes tout à fait remarquables, initialement parus en un temps où SENSO ne comptait pas ses lecteurs d'aujourd'hui. Et à côté des rubriques classiques du magazine, qui sont, elles, entièrement originales bien sûr, nous vous offrons un disque parfaitement estival, une compilation des plus rythmées intitulée 'SENSO-Mambo'.
Il y a quelques mois, la couverture de SENSO avait été confiée à Sempé, un maître absolu. Cette fois, c'est au tour de Loustal, très reconnu déjà, qui est peintre autant qu'illustrateur. Nous poursuivrons cette association des graphistes de toutes sensibilités avec les écrivains.
Quant à notre maquette, elle semble avoir inspiré la concurrence et suscité des vocations. Pour nous, ce sont là des hommages rendus à SENSO, son originalité et ses lecteurs. Bon été !
Secrète Italie
C'était il y a deux ans, un peu plus. Pour son troisième numéro, SENSO affichait "Italie, passion française", notre plus grand succès de vente à ce jour. On nous en parlait si souvent et avec tant d'émotion que nous avons pris le parti d'ajouter un chapitre à cette histoire d'amour. Avec l'Italie, Nous nous sommes tant aimés, pour reprendre le titre français d'un film trentenaire d'Ettore Scola, qui nous enchante toujours aussi dans sa version originale, C'eravamo tanto amati...
Voici donc le numéro 14, cette "Secrète Italie" qui le restera toujours, c'est le trait des vraies passions que de ne jamais se dévoiler entièrement. Nous avons cherché à dessiner une "carte du tendre" associant l'établi et le méconnu, qu'il s'agisse de paysages ou de créateurs. Nous n'avons pu résister au plaisir de célébrer les autrefois enchanteurs, puisque depuis deux millénaires, la Péninsule séduit, ravit, émeut.
Mais nous avons aussi voulu regarder l'Italie d'aujourd'hui, et cerner des tendances à peine perçues encore hors du pays. À cette fin, nous avons sollicité le concours de confrères italiens, rassemblés par notre ami Franz Botré, éditeur de presse exigeant.
La littérature et la peinture, on s'en doute, sont extrêmement présentes dans ces pages. D'autres disciplines aussi, arts mineurs ou non, l'automobile, la gastronomie, la chanson, le voyage. "L'air du temps", "Le temps de vivre", "Vivre sa vie", "La vie est belle", "Bella Ciao": les thèmes, les refrains, les agréments s'enchaînent, la farandole italienne ne s'interrompt jamais.
Paris
Longtemps, nous avons rêvé du New Yorker. Comme bon nombre de nos confrères, il est vrai. Nous nous enchantions de l'équilibre légèrement distancié entre textes et dessins, les uns et les autres commandés aux meilleures plumes. Un exemple, un cas d'école, un succès.
Longtemps, nous avons espéré un magazine français qui traduirait notre dilection pour la référence américaine. Il n'est pas venu, alors nous avons décidé de l'imaginer nous-mêmes, convaincus que des lecteurs en nombre partageraient notre pressentiment selon lequel "on peut vivre sans SENSO, mais tellement moins bien"...
Longtemps, nous en avons médité le contenu et l'apparence.
Longtemps, nous en avons élaboré la feuille de style.
De l'allure, de l'élégance, du fond, garantis par des écrivains et par des peintres admirés. Nous avons eu raison de vous espérer, lecteurs, vous nous avez rejoints.
Abordant notre troisième année, il nous a paru bien venu d'infléchir légèrement le contenu et la forme de SENSO, en tenant compte de remarques multiples et sollicitées. Les écrivains, toujours, les illustrateurs, plus encore. La présence en couverture d'une œuvre inédite de Sempé - à qui fut offerte à maintes reprises la une du New Yorker - dit assez notre propos.
Nous avons également affiné la maquette de SENSO, désormais conçue et exécutée par nos seuls soins, selon une nouvelle direction artistique. Plus claire encore, pensons-nous, plus accessible, plus lisible par un balisage et des points de repère plus manifestes. Ce numéro "Paris", le premier que nous consacrons à une ville, nous l'avons voulu particulièrement riche de textes et d'images. D'autres suivront, "New York", forcément. Et nous reviendrons à l'Italie dès ce printemps ! Comme vous, nous l'avons toujours tellement aimée, notre sœur latine.
Voici donc Paris de jour et de nuit, dans ses quartiers et ses établissements de bouche, dans ses traditions d'hier et ses excès d'aujourd'hui. Le Paris des Parisiens d'origine et celui des étrangers devenus Parisiens, notre Paris, le leur, le vôtre. Paris nous appartient.
Lumière !
Cadeaux
"Je suis riche de ce que j'ai donné." De qui, ce mot admirable? Laurent de Médicis, peut-être, qui aurait de toute façon pu y prétendre. Offrir, s'offrir : la période est favorable, et c'est l'esprit de ce numéro. Les contributions ici rassemblées, nous les avons sollicitées dans cette perspective-là, faire plaisir. Pour en souligner l'évidence, nous revenons au signe immédiatement distinctif des premiers numéros de SENSO, ce supplément indépendant que tout lecteur conserve et s'approprie par l'usage. Cette fois, c'est d'un calendrier "collector" qu'il s'agit, illustré de douze planches originales de l'ami Loustal, compagnon de SENSO depuis son lancement. C'est aussi pour nous un signe de la main en votre direction. Deux années d'existence, douze numéros : remémorons-nous ensemble la gratifiante richesse de contenus proposés par le texte et l'image. Pour vous, pour nous, de vrais cadeaux précisément, espérés et vécus comme tels, croyons-nous.
L'idée de dédoubler la valeur et l'esprit SENSO, nous le poursuivrons à travers l'année 2004 avec un nouveau type de supplément offert, adjoint au magazine. Nous vous proposerons en effet, avec chaque numéro, un carnet de voyage dessiné par Alain Bouldouyre et complété d'informations pratiques,
un peu à l'instar de ce que vous découvrirez ici sous sa plume, au retour du Sri Lanka (Ceylan). Ce seront, dès le numéro 13 (février 2004), les "Carnets du Chili". Beauté, intelligence, utilité, les trois valeurs fondatrices de SENSO.
Dans les pages qui suivent, célébration de la fête et des cadeaux, donc. Le luxe du Grand Véfour, de Jacques Garcia ou de Berluti, les nuits extrêmes de Moscou, les soirs de Miles Davis, les réveillons contrastés de Visconti, de Marc Lambron et de Philippe Besson, les voyages en offrande jusques à Samarcande dont le nom déjà prête au rêve... Nous nous sommes même offert les approches lexicale et analytique de la notion de présent. Présent, précisément. Curieuse conjonction entre le mot qui qualifie l'actuel et celui qui désigne le don. Être et avoir. Éprouver et recevoir. Ressentir pour soi et l'autre. Délicieux vertige de mots : que 2004 vous soit propice !
Ivresse
Rouge, le vin est rouge, surtout. Même s'il peut aussi s'offrir en blanc et en rosé. Rouge comme le sang, rouge comme le désir, comme la passion. Il confère l'ivresse, cet excès apprécié des dieux.
Ivresse en tout sens, ivresse de tous les sens : c'est à toi que nous dédions ce numéro.
La saison s'y prête, celle des vendanges et des foires aux vins : c'est d'abord à la bienfaisante ivresse oenologique que nous nous consacrons. La vigne et son fruit prodiguent une heureuse source d'inspiration, dont on verra qu'elle rassemble et séduit. Plaisirs du goût et des mots, bonheur aussi de la collection, de la simple acquisition. Nous n'avons pas seulement voulu tenter, mais aussi être utile. Aussi avons-nous requis la compétence, les relations et l'intuition de deux amis de Bacchus et de SENSO, Anthony Rowley l'historien et Vincent Noce le journaliste. Ils nous ont concocté le gouleyant mélange qui suit, en ennemis de l'à-peu-près, du convenu et de ce qu'ils appellent "l'idéologie de la mesure". Les lecteurs de SENSO ne participent évidemment pas à quelque célébration de l'ascétisme dissimulée sous les diktats du bon goût. Gloire à l'ivresse, celle qui réduit la distance entre le corps et le monde, qui ouvre la bouche et dilate le regard autant par anticipation que dans la répétition du plaisir. Celle qui rend maladroit dans les gestes, muet parfois devant ce qui s'offre. Celle qui renverse l'ordre de la civilité cul par-dessus tête et en rit à gorge déployée. Au fond, nous avons voulu imaginer les enfants de Noé, ivres et heureux.
Notre ivresse, ce sont Julian Barnes en extase devant un Château Rayas; Pierre-Jean Rémy, Bernard Pivot, Jean-Pierre Coffe et Jacques Lacarrière humant leurs vins préférés; Hervé This, Elisabeth Barillé ou Bernard Frank repérant les mécanismes secrets qui conduisent aux rivages de l'exaltation alcoolique, Jim Harrison et Richard Bohringer ne reniant rien de leurs extases alcoolisées.
L'ivresse selon SENSO mène aux frontières délectables du souvenir, au moment où celui-ci s'abolit dans le plaisir et l'oubli.
Pour vous, de bonnes lectures, des achats judicieux, d'heureux débordements !
Chaleur
C'est l'été. Enfin, s'enchante la plupart d'entre nous. Deux mois de plus réelle latitude pour répartir le temps à son gré. Moins de bruits parasites. Il va faire chaud, espère-t-on. Les livres et les journaux mis de côté, on va pouvoir les ouvrir, les regarder, les respirer. Lire en paix, à son rythme, quoi de plus délectable ?
La littérature, nous l'aimons, nous la révérons même. Elle nous isole du monde en nous le redonnant. L'auteur écrit pour tous, et d'abord pour nous seuls. Le texte, un enchanteur que nous célébrons à longueur de pages, façonné au long de dix numéros - déjà - par des écrivains que nous admirons. Plusieurs nous rejoignent, beaucoup nous reviennent, cultivant en votre compagnie ce style SENSO que l'on commence à reconnaître. En regard, l'illustration, l'autre de nos points forts. Ce sont cette fois des peintres que nous avons conviés, autant que des dessinateurs. Leur apport, convenons-en, nous a conquis.
L'été : dans la journée, besoin de fraîcheur et d'ombre, de silence et de calme. Tard à la brune, les oiseaux et les grillons se sont endormis. Nous, nous n'avons pas sommeil. Heures de désir, qu'exacerbé la saison. Nous avons voulu les évoquer aussi, "lourdes, lentes" comme les décrivait si bien André Hardellet. Heures de loisir : l'été autorise l'excès, un mot que nous aimons bien.
SENSO, ou l'art de la plume.
Excès
Singulier, ce numéro 9 en rouge et noir, pour un printemps de l'excès au pluriel. Notre couverture l'exprime-t-il assez? Nous avons voulu vous emmener loin, assez loin, dans la célébration littéraire et illustrée du beau, du bien et du bon dont, selon les Grecs, la réunion plaisait aux dieux. À ces derniers, parmi d'autres, "tout est meilleur quand il est excessif", affirmait le divin marquis qui, sur le sujet, en connaissait un rayon... Pour tout dire, nous nous sommes particulièrement amusés à composer l'ensemble que vous découvrez. Nous entendions évidemment respecter la personnalité de SENSO et l'attente de ses lecteurs : les thèmes que nous abordons doivent d'abord et avant tout être élégamment écrits et dessinés à la plume, des plumes dignes de cette appellation. Nous rappellerons un jour prochain les noms de ceux qui nous ont accompagnés depuis le lancement de SENSO, il y a un peu plus d'un an et demi : que de marques de confiance, que de promesses d'excellence!
Excès, donc, cette fois. Dans tous les domaines abordés en général par SENSO, qui touchent aux cinq sens traditionnels enrichis de la mémoire et de l'itinérance. "Excès", l'avez-vous remarqué, est aussi une presque anagramme de "sexe". Aussi ne nous voilerons-nous pas inutilement les yeux : ces plaisirs-là sont ici dûment évoqués par ces compétences avérées que sont par exemple Catherine Delbourg, Patrice Varenne, Alex Tosches, Nick Sollers, Philippe Breillat,ou André Bercoff. Pourtant, il est des excès en toute matière. La mode selon Galliano, l'ascétisme des stylites, l'aliénation par le portable, le sport comme déviance chimico-morphologique, autant de sujets développés dans ces pages. Dont certaines, non massicotées, conjuguent l'agrément du trait et l'intensité de l'émotion.
Ce numéro 9 de SENSO, nous aimerions que vous ayez l'envie de le conserver. Au reste, nous pensons bien qu'il en sera ainsi, et nous en sourions d'avance avec vous. L'élégance...
Ailleurs
Ailleurs. Masculin ou féminin? Singulier ou pluriel ? Proche ou lointain ? Propre ou figuré? Géographique ou intérieur? Un mot prodigieux qui décrit moins qu'il n'exclut. Ailleurs, on ne sait pas ce que c'est, mais on entrevoit ce que ce n'est pas. Rien de prévisible, rien de rituel. Ailleurs, c'est s'aventurer en dehors de soi, partout et nulle part, le rêve en quelque sorte. À peine l'a-t-on prononcé que le mot fait naître des retours poétiques. "Lointains intérieurs", "je est un autre", "pays où l'on n'arrive jamais". Le décliner selon les six sens que nous revendiquons, c'est s'autoriser la surprise et espérer le dépaysement, qui ne doivent rien à la distance parcourue. L'aventure est au coin de la rue, nous avons dès l'origine adopté ce refrain d'autrefois.
Ce qui ne prohibe nullement le long cours. Dans ce numéro, nous traverserons le continent africain avec la Croisière noire, nous suivrons un clone de James Bond aux Bahamas, nous nous perdrons dans les rues de La Havane et sur les hauteurs de Capri, nous nous enchanterons des couleurs du cinéma indien, des parfums du désert, des rapprochements étonnants auxquels procède la "world music" - tout comme la "world food", que l'on peut louer ou haïr. De nouvelles plumes comme celles de Jean-Christophe Rufin, de Catherine Clément, de Patrick Poivre d'Arvor, de Vénus Khoury-Ghata, de Jean-Claude Lamy, d'Elisabeth Quin, de Julie Andrieu. Daniel Arsand parcourt la grande épopée érotique de Java ; Vincent Noce, les cuvées méconnues d'Europe.
Lectrice de SENSO, Andrée Putman la grande nous ouvre sa porte. Un duo de poètes majeurs d'aujourd'hui nous confie des textes neufs, tandis que l'écrivain de l'ailleurs par excellence qu'est J. M. G. Le Clézio donne à ses réponses une admirable densité aventurière.
Dans la construction même de SENSO, nous avons voulu être désormais plus clairs, plus nettement encore magazine que revue. De nouvelles rubriques - agenda shopping, analyse graphologique d'un écrivain par Martine Le Coz - s'ajoutent aux "Mots de la fin", à "Ils lisent SENSO" et aux "Hôtels SENSO". Toujours ou de nouveau dans nos pages, Michel Déon, Gilles Perrault et Olivier Frébourg, Alain Gerber et Michka Assayas, Marc Lambron et Alain Rey, et bien d'autres encore. Dessin, photographie, affiche, peinture : ces genres graphiques qui nous sont chers et qui caractérisent SENSO, nos pages en sont irriguées. En ce huitième numéro, des créations de Jacques de Loustal, André Juillard, Florine Asch, Alain Bouldouyre, Ludmila d'Oultremont, Miles Hyman, Jean-Christophe Lerouge, Emmanuelle Toesca, entre autres. Et tout cela, ailleurs ? Non, ici même.
Gourmandise
L'époque ne serait pas à la légèreté. Tant pis ! "II est poli d'être gai", quand même - comme aurait dit Oscar Wilde - et... gourmand, a-t-on envie d'ajouter. En dédiant ce numéro à la gourmandise - toutes les gourmandises, celles des mets comme celles des mots, celles des sens comme celles des sons, celles de l'esprit comme celles des images - SENSO s'inscrit dans son temps.
Les plumes que nous aimons - alertes, sensuelles et vagabondes - ont exploré avec avidité les territoires, parfois surprenants, où se niche le gourmet : dans les fastes du Champagne - bien sûr -, la lascivité du chocolat, la touffeur des spas, la langueur d'une palmeraie ou les sortilèges d'une île ; mais aussi dans une note de Chet Baker, un claquement de jarretelle, l'anse d'une hanche, les aveux d'une jeune fille ou les secrets d'une capitale gourmande, Bruxelles, à moins d'une heure de Paris.
Rien ou presque de ce qui se hume, se flatte, s'admire, se délecte, se déguste ou se dévore n'a échappé à nos appétits. Jamais peut-être dans la courte histoire de SENSO n'avait-on autant justifié le parti pris hédoniste qui est le nôtre : celui de faire plaisir en se faisant plaisir. Pourquoi "bonne chère et beau langage", pour une fois, ne s'épouseraient-ils pas? Avec pour prétexte, sinon comme excuse, la gourmandise. Ce péché capiteux.
Zen
Ils ne sont pas nombreux, les vocables d'origine asiatique passés dans le français courant. Quelques termes culinaires ou sportifs viennent à l'esprit. Peu de chose au total, et rien qui puisse se comparer à la stupéfiante faveur du mot clé de ce numéro. Nous ne nous contentons plus d'être "cool", il nous faut désormais être "zen". On verra avec François Jullien et Élisabeth Barillé ce que recouvre exactement cette notion philosophique aux implications évidemment complexes. De longue date, nous avions envie de l'Asie, après nous être, au fil des années, arrêtés en Angleterre, en Italie, en Amérique ou à Paris. Les orients extrêmes, les continents poivrés, les mers chaudes. Alors nous avons vu grand : ce ne sont pas moins de six collaborateurs que SENSO a envoyés au-delà du Levant, là-bas, loin, très loin, dans ces terres et ces îles où demain est là tandis qu'ici, effet du décalage horaire, c'est encore hier. Simultanément, nous nous entendions avec Gallimard pour vous proposer un avant-goût de l'Album de la Pléiade 2005, dévolu aux Mille et Une Nuits.
C'est peu dire que Singapour a inspiré Alexandre Kauffmann, l'Inde, Cécile et Nicolas Guilbert,la Chine, Olivier Frébourg et la Thaïlande, Julia Floransac. Le Japon est terre d'élection pour Philippe Forest et Jean-Luc Toula-Breysse, terre maternelle pour Amélie Nothomb, terre d'amitié pour René de Ceccatty. Quant à Éric Holder l'écrivain et Marceline Truong le dessinateur, ils ont cheminé de conserve à la découverte de Taiwan, l'île de Chine méconnue. À leur façon, André Bercoff, Gérard de Cortanze, Philippe Besson, Yves Simon, David Batty les ont rejoints dans cette conjugaison au pluriel du tropisme oriental. Illustrateurs nouveaux venus, Guillaume Reynard et Bertrand Dubois se pénètrent eux aussi de l'esprit si raffiné de ce numéro, à l'instar d'un Loustal, d'un Ricco, d'un Bertrand, compagnons de longue route. Quant à Jean-Pierre Dionnet, Romain Slocombe et Denis Grozdanovitch, qui débutent à leur tour dans les pages de SENSO, ce sont des experts du cinéma asiatique et du noble jeu de tennis. Dont on verra que ni l'un ni l'autre ne bannissent l'esprit zen. Ces plumes légères et avisées dessinent un univers à la fois dense et dépouillé, dont notre couverture se veut le reflet. Le blanc est une couleur de l'âme, réceptive, propice même à toutes les émotions. Mais qui a jamais pu en douter ?
Olivier Merlin vient de nous quitter, presque centenaire. Comme ses lecteurs du Monde au long d'un demi-siècle, nous n'oublierons pas ce gentleman-journaliste qui honora le premier numéro de SENSO d'un reportage à motocyclette au pays du fair-play, cette Angleterre qu'il aimait tant.
I love New York
Le voici. Nous allions ajouter " enfin ", mais nous aurions eu tort. Le numéro que nous rêvions de construire avec le concours du New Yorker, vous le tenez à présent entre vos mains, en cette fin d'hiver 2006, quatre ans et demi après le lancement de SENSO. Maintes fois, nous nous sommes référés au grand hebdomadaire américain - un million d'exemplaires vendus chaque semaine ! - dont nous apprécions tant la maquette et l'esprit, le style en un mot, à l'instar de tellement de nos confrères et de nos lecteurs. Depuis plus de quatre-vingts ans, le New Yorker " dit " New York aussi bien que Leonard Bernstein, que Philip Johnson, que Philip Roth ou que Woody Allen. Et pour des journalistes, il n'est pas imaginable de n'y pas rêver. Puisque nous songions à un numéro " New York ", nous nous sommes donc mis en relation avec le New Yorker. Ses responsables, après examen de notre proposition et de plusieurs de nos livraisons, nous ont agréés : avec l'Amérique, les choses sont souvent plus simples qu'on ne le croit. Et voici comment nous sommes en mesure de vous offrir à son heure un vingt-troisième numéro de SENSO, dont une partie substantielle provient d'un travail d'écriture et d'illustration conçu en hommage au New Yorker. À laquelle s'ajoutent les écrits de plusieurs de nos collaborateurs qui se sont, eux aussi, rendus à New York.
" I love New York ", affirme à son tour notre couverture. C'est peu dire! La Grosse Pomme, comme elle aime à se surnommer, nous nous enchantons de sa splendeur changeante, de sa vitalité consubstantielle, de son aptitude à l'anticipation et au mélange. New York se vit comme un film en accéléré, accessible sans sous-titres à tous les publics. Elle est la métropole de notre monde, universelle en même temps que singulière absolument. Oui, comme vous, nous aimons New York, et c'est en partenariat avec Directours, spécialiste du voyage individuel aux États-Unis, que nous avons construit sur place ce numéro effectivement spécial.
Depuis sa création, SENSO réunit les écrivains, telle est sa vocation première. Certains sont présents dans chaque numéro, comme Alain Rey, Marc Lambron, Alain Gerber, Gérard de Cortanze et Philippe Besson. Philippe Claudel, prix Renaudot 2003 avec Les Âmes grises, se joint à eux désormais, pour un "saisonnier " de son pays lorrain. Nous l'espérions, cet almanach de couleurs et de sons, déclinaison littéraire des cinq sens décrétée par SENSO .
Nous avons plaisir à remercier vivement Jean-Christian Agid, des services culturels du consulat de France à New York, pour son aide dans l'élaboration de ce numéro.
De port en port
Lever l'ancre, il est temps. Chérir la mer. Rêver à la sirène. Les poètes ont tous espéré partir, et nous aussi qui ne le sommes pas assez. S'aventurer "de port en port", quelle plus belle perspective pour ces mois d'été? Changer d'horizon, d'atmosphère, de point de vue ; choisir l'ailleurs, l'imprévu, l'autre : au retour, que nos angles de certitude soient rabotés par le fil des latitudes. Et puisque la saison présente altère et enrichit notre espace-temps usuel, affinons en symétrie notre lot de mots-images.
Chaque numéro de SENSO, dès qu'il échappe de nos mains pour parvenir aux vôtres, nous le considérons d'abord par rapport à celui qui l'a précédé. Il lui faut être à chaque fois, croyons-nous, toujours plus "beau-intelligent-utile", selon cette triade qualificative à laquelle nous aspirons. Et à quoi nous avons voulu ajouter en cette période de vacances une once supplémentaire de légèreté.
Nos sommaires traduisent des affinités électives. Des familles de sensibilité se dessinent, composées d'écrivains et d'illustrateurs qui ne se connaissent pas forcément, mais se retrouvent bien ensemble dans ces pages, vous le percevez comme nous, vous nous l'écrivez. Et, comme à chaque fois, nous avons le sentiment - provisoire - d'être parvenus à un harmonieux équilibre entre les textes, les images et la maquette. Et si c'était vrai?
Senteurs
Aux "Senteurs du monde", thème de ce numéro de SENSO, il existe un équivalent synthétique en français : tout l'œuvre de Charles Baudelaire. Et nous aurions pu - nous aurions dû, peut-être - ouvrir cette quatrième livraison par la simple reproduction de l'un ou l'autre de ses poèmes qui disent à jamais la perception olfactive du monde, le primat de l'odorat sur les autres sens. Si "les parfums, les couleurs et les sons se répondent", ce sont les premiers qui nous livrent les clés de l'autre et de soi-même. La chère Italie l'avait pressenti, pour qui le verbe sentire ne veut pas seulement dire "sentir", mais bien "percevoir" tout simplement.
Ainsi vont apparaître en désordre et en bouquets, les effluves et les arômes, les fragrances et les exhalaisons. Une évidence se manifeste : cette catégorie un peu en retrait de notre sensibilité, en tout cas moins célébrée que le visuel ou que le sonore, renvoie presque d'emblée à l'enfance, au point d'en devenir un quasi-synonyme. Quelle que soit en effet la génération à laquelle ils appartiennent, beaucoup d'écrivains ici réunis ont eu l'envie d'un regard en arrière. Pas tous néanmoins, il fallait aussi que SENSO racontât notre époque et notre monde, et qu'à la mémoire nous unissions le vivant.
En imaginant SENSO, nous entendions associer en style le beau, l'intelligent et l'utile. Vaste ambition ! À certains signes - et d'abord par la réalité concrète de l'accueil réservé à nos trois numéros, et donc par le nombre d'exemplaires vendus, pourquoi ne pas vous le dire ? - il nous apparaît que sans avoir gagné la partie tout à fait, nous ne l'avons certes pas perdue. Ensemble, nous poursuivrons dans l'exigence partagée. On le remarquera dès l'abord, nous avons pris le parti d'intégrer le contenu du guide pratique dans les pages terminales du magazine lui-même. Et ce pour de puissantes raisons techniques : la double épaisseur de l'ancienne présentation et le risque d'arrachage du "petit" en rendaient l'exposition et la manipulation malaisées dans les points de vente. Pas question pour autant de renoncer à cette spécificité de SENSO, qui entend offrir à ses lecteurs les moyens de céder à bon compte à la tentation racontée et illustrée. L'information proposée naguère dans le guide se retrouve désormais intégralement dans le "grand", imprimé de façon autonome selon une mise en page et sur un papier distincts.
Merci de votre heureuse compagnie.
Italie
Notre cousine, notre voisine, notre racine aussi. L'Italie nous est plus que proche, elle détient un grain de nous-mêmes, et nous sommes un peu de ce qu'elle est. Deux millénaires et plus d'histoire mitoyenne, quand elle n'est pas commune - ô César! ô Charles d'Anjou! ô Napoléon! -, des influences réciproques dans tous les domaines : il faudrait des volumes pour consigner les signes et les gestes de cette mutuelle attirance. Pourtant, cette familiarité, sans égale avec quelque autre de nos voisins, n'implique nullement l'identité des sensibilités. N'empêche, pour nous comme pour tous, l'Italie, le "pays de la beauté" comme elle aime à se définir, revêt les atours éternellement changeants d'une séduction inépuisable. L'Italie est opéra sublime.
SENSO est né d'une dilection sans exclusive pour l'Italie. Le mot revêt une sonorité musicale, il sert de titre à un roman et au film qui en a été tiré, tous deux mémorables et évoqués ci-après. Alentour, une quarantaine de "moments" racontés et illustrés, comme de coutume dans SENSO, par les plumes à nos yeux les plus raffinées, les plus frottées d'italophilie. Un angle commun à ces contributions, dont certains auteurs, et nous en sommes fiers, sont en passe d'être présents dans chaque numéro de SENSO : le regard porte sur un aspect méconnu de l'Italie. Car la Péninsule n'est pas toute dans les guides et les ouvrages d'histoire, ce numéro le démontre à chaque page. L'Italie est livre d'heures.
Une Italie vécue et éprouvée dans la connivence au travers de toutes ses singularités. Bruits de la ville et bande dessinée, calcio et truffe blanche, shopping et télévision, voilà quelques exemples pour le bel aujourd'hui. La Rome antique et le rêve colonial, des cités secrètes et somptueuses, des écrivains et des monuments négligés, gages entre autres d'un passé éternellement présent et tentateur. Splendeur de la langue des actrices, des voix. L'Italie est jardin des sens.
Pour nos auteurs, ce sont là émerveillements et souvenirs de toute une vie. Nos lecteurs, pensons-nous, liront et contempleront ces feuillets illuminés, et voudront à coup sûr s'en approprier le contenu. Aussi notre guide pratique, cette fois composé sur cent pages, se veut-il encore plus complet, plus global. L'Italie, comme toutes les passions, se partage.
L'intime
Intime idée, intimider. Jeu de mots ? Pas seulement. Et le serait-ce qu'on se souviendrait avec Freud et Barthes que l'apparente gratuité du jeu de mots n'est pas toujours le fait du hasard. Intimité révélée, intimité préservée. Consacrer le deuxième numéro de SENSO à l'intime, c'est offrir de décliner pour le plaisir, par les plaisirs, l'armoriai le plus étendu d'émotions.
Et puis, l'intime semble beaucoup solliciter les créateurs ces temps-ci. Photographies, ballets, lingerie, théâtre se conjuguent à l'aide de cet auxiliaire si précieux de l'imaginaire. Pour illustrer cette tendance affirmée, nous avons réuni comme à chaque parution des plumes que nous admirons, à qui convient l'intériorité. Les sens, ou plutôt les formes de la sensibilité, nous en avons ici retenus six, chacun résumé en un verbe : le toucher vient en tête avec son cortège de célébrations du corps, et le souvenir clôt la parade, lui qui illumine notre éternel et nécessaire recours au temps passé. Près de deux cents pages, agrémentées de photographies et d'illustrations, que nous avons elles aussi choisies pour leur pertinence et leur qualité. Cette ambition qui est la nôtre, tout entière adressée au lecteur, exige une unité de style entre textes et images, entre suggestion et information. Les marques concrètes d'intérêt qui nous sont prodiguées depuis la sortie de notre première livraison constituent le plus fervent encouragement. Entrons ensemble dans l'hiver, cette saison si propice aux trouvailles et aux retrouvailles.
So british! So sexy!
SENSO, nous le faisons pour nous, c'est-à-dire pour vous. Persuadés de cet argument : la curiosité, le désir, l'exigence même existent envers un magazine des plaisirs et des sens qui offrirait au lecteur un authentique catalogue d'agréments. Aussi avons-nous méticuleusement construit SENSO selon tous les domaines ou presque du temps choisi, autour d'un thème plaisamment déclinable : chacune des neuf muses se retrouve en ces pages, conjugaison transversale que tout lecteur, toute lectrice peut s'approprier à son gré, à son rythme.
SENSO entend séduire par le style de son écriture et de ses images. D'où les talents de plume ici réunis, d'écrivains ou d'illustrateurs. En ce premier numéro, un parti pris iconographique, le recours exclusif à l'aquarelle, au dessin, à la vignette, pour nous tout à fait adéquats au sujet proposé. SENSO s'attache aux ambiances et aux paysages, aux objets et aux œuvres, aux visages et aux corps. Pour les traduire, un traitement tout subjectif s'est imposé à nous, qui n'exclut en rien la précision, et s'adresse d'abord à la sensibilité.
SENSO, bouquet d'émotions en cinq sens offert à son public afin qu'il les partage. Chaque numéro est donc composé de deux livraisons distinctes, de format et d'usage différents et complémentaires. Le "grand" raconte, par le texte et le dessin, le "petit", guide pratique, renseigne et précise. Dans l'un, la tentation, dans l'autre, les moyens d'y céder.
SENSO, espérons-nous, établira avec vous des liens particuliers, ceux des membres d'un cercle implicite. Une complicité qui ne doit rien à l'argent et tout à l'esprit. Un échange. Les Anglais ont une jolie expression pour engager l'avenir en formulant des souhaits : "Happy returns !"