Voyage à la Nouvelle-Orléans en 2025 : jazz, culture créole et magie du Vieux Carré - Testé par Luxe Magazine
À la Nouvelle-Orléans, le temps ne s’écoule pas, il s’imprègne. D’histoire, de musique, de parfums d’épices et d’humidité. En 2025, "The Big Easy" n’a rien perdu de sa lente ferveur. Il suffit d’une marche dans le Quartier Français, cœur vibrant et fragile de la ville, pour en mesurer l’âme.
Les balcons en fer forgé se drapent de guirlandes fleuries, les volets s’ouvrent paresseusement sur les façades pastel, et les pavés usés murmurent encore les pas des fondateurs venus de France. Rue Bourbon, le jour flirte avec la décadence joyeuse de la nuit : musiciens de rue, odeurs de bourbon vanillé, portes ouvertes sur des bars où l’on danse encore à midi. Mais pour ceux qui préfèrent les frissons plus sincères du jazz, c’est Frenchmen Street qu’il faut rejoindre – à deux pas, mais un monde à part. Là, au Preservation Hall ou dans les clubs improvisés, la trompette dialogue avec la contrebasse, dans cette langue sans âge qui fait battre le cœur de la Louisiane.

Fondée en 1718 par les Français sur les terres marécageuses du Mississippi, puis façonnée tour à tour par les Espagnols, les Créoles et les Acadiens, La Nouvelle-Orléans s’est inventée au croisement des empires, des langues et des peuples. Ville carrefour, elle a vu naître les révoltes, la traite, le métissage, mais aussi une culture sans équivalent, faite de syncrétismes et de résilience. À chaque angle de rue, un pan de cette mémoire affleure : une plaque en fer forgé, un nom d’origine africaine, un air de jazz. Ici, l’histoire n’est pas figée — elle palpite sous les pierres, elle s’entend, elle se danse.
Fondée en 1718 par Jean-Baptiste Le Moyne de Bienville sur les rives basses et marécageuses du Mississippi, La Nouvelle-Orléans est le fruit d’un entrelacs colonial unique : française par naissance, espagnole par héritage, américaine par transition. Mais ce sont surtout les hommes et les femmes venus d’ailleurs — esclaves ou migrants, marchands ou exilés — qui en ont façonné l’âme. La ville est née de ces frictions : entre les codes du Vieux Continent et les réalités du Nouveau Monde, entre les chants liturgiques et les percussions africaines, entre ordre colonial et résistances souterraines.
Partout, la mémoire affleure lors de notre visite guidée: dans les allées du Garden District, les porches du Treme ou les fer forgés du Vieux Carré. Certains lieux en sont les pierres angulaires. La cathédrale Saint-Louis, silhouette blanche posée sur Jackson Square, rappelle l’ancrage catholique hérité de la France et de l’Espagne. L’Old Ursuline Convent, le plus ancien édifice de la ville, témoigne d’une présence religieuse dès le XVIIIᵉ siècle. Et le Cabildo, palais municipal d’inspiration espagnole, abrite encore les archives du passage de la Louisiane aux États-Unis. Rien ici ne s’efface : tout s’ajoute, se transforme, et compose, lentement, une ville palimpseste. Même la pharmacie d’époque située rue Royale exhale une époque révolue !

Dans cette salle exiguë de la rue St. Peter, rien n’a changé depuis 1961 : ni les murs bruts, ni les bancs en bois patiné, ni le souffle sacré de la trompette. Plus qu’un lieu, le Preservation Hall est un sanctuaire, fondé pour honorer l’une des expressions les plus pures de l’art américain : le jazz traditionnel de La Nouvelle-Orléans. Chaque soir – plus de 350 fois par an – une formation issue d’un collectif de musiciens locaux y perpétue cette tradition vivante. Parmi eux, Wendell Brunious, trompettiste et chanteur à la lignée musicale illustre, incarne cette fidélité à la mélodie comme vecteur d’émotion. Héritier d’un son né avant l’amplification, il joue comme on parle : avec souffle, nuance et mémoire. Ici, chaque note porte l’écho d’une époque, mais surtout d’un héritage vivant.
Même si le bâtiment ne paye pas de mine, nous restons bluffés à l’intérieur par l’ambiance et le rythme qui se dégage. Debout ou assis, nous vibrons au même rythme, celui du jazz !

À quelques pas, Bourbon Street déroule sa frénésie comme une scène ouverte, à ciel nocturne. C’est un théâtre de néons et de décibels, de verres à emporter – les fameux “go cups” – et de balcons surplombant la foule, comme autant de loges vibrantes. Ici, rien ne se ferme vraiment : ni les portes, ni les voix, ni les nuits. Fondée sur un nom royal, mais associée à tous les excès, cette rue légendaire pulse au rythme d’un carnaval permanent. On y croise l’exubérance, le rire, parfois le chaos, toujours la vie. Et dans ce tumulte organisé, certains repères demeurent : le Fritzel’s European Jazz Pub, doyen des clubs de jazz de la rue, où l’on s’attarde pour écouter un swing fidèle à ses origines ; ou le Maison Bourbon Jazz Club, l’un des rares à se consacrer exclusivement au jazz traditionnel. Tout change à La Nouvelle-Orléans, sauf peut-être la couleur, le bruit et la démesure joyeuse de Bourbon Street, qui semblent, elles, ne jamais dormir. Nous sommes attirés comme des papillons par la lumière, par ces mélodies de jazz et de blues et nous nous déhanchons au rythme des notes !
Frenchmen Street : là où le jazz bat encore à cœur nu
Un autre soir, à quelques rues seulement de l’agitation de Bourbon Street, nous nous dirigeons vers Frenchmen Street , qui vibre autrement. Dans ce couloir étroit du Faubourg Marigny, la musique n’est pas un décor : elle est une langue vivante, parlée chaque soir dans des clubs comme Snug Harbor ou The Spotted Cat. Ici, pas d’artifice — juste des musiciens, une proximité brute, et cette intensité authentique que seuls les lieux fréquentés par les locaux savent encore offrir. On aime cette proximité, cet engouement et cette ambiance bon enfant !

Et puis, il y a ces haltes gourmandes qui prolongent le charme du Vieux Carré.
Nous choisissons Muriel’s Jackson Square, au 801 Chartres Street.
Il incarne à lui seul l’opulence discrète et le mystère vibrant de La Nouvelle-Orléans. Sous les voûtes de ce bâtiment historique, le chef Erik Veney signe une cuisine créole contemporaine, à la fois raffinée et généreuse. Nous nous laissons tenter par un canard rôti et une soupe de tortue au sherry ! À l’étage, dans le clair-obscur d’un salon privé, les convives s’immergent dans une atmosphère feutrée, presque hors du temps, où les murs semblent encore porter les éclats d’un passé fastueux. On dit que le propriétaire hante encore les lieux et une table dressée pour lui l’attend tous les soirs ! Nous nous attendons presque à voir trembler la table !


Et puis, il y a le fleuve. Large, calme, indifférent, le Mississippi déroule ses eaux opaques comme une veine millénaire. Nous montons à bord de la Creole Queen, une majestueuse embarcation à aubes, qui nous entraîne pour une traversée du temps : deux heures trente de voyage commenté, porté par la voix d’un historien local, jusqu’aux terres silencieuses de Chalmette, théâtre de la bataille fondatrice de 1815. On y évoque les frères Le Moyne, la Louisiane française, le Tremé, quartier noir par excellence, Marigny, et cette mémoire toujours vivante, guidée par les mots des rangers du parc national Jean Lafitte. Dommage que les rives du Mississipi, ne portent plus l’imaginaire des plantations de l’époque, mais malheureusement les stigmates de notre époque !

De retour en ville, nous posons nos valises au Renaissance New Orleans Pere Marquette French Quarter Area Hotel, refuge urbain, niché sur Common Street. Parfaitement situé entre les pulsations du Quartier Français et la verticalité du Central Business District, il offre une halte aux voyageurs en quête de confort. Chambres sobres relevées de clichés d’artistes locaux, service sympathique et un bar où l’on croise aussi bien les hommes d’affaires que les mélomanes fatigués.
Pour une petite faim nous descendons au Tacklebox pour y déguster des huîtres au bar avant de se laisser porter par le Quartier Français et ses rythmes jazzy !

Au petit matin direction Café Beignet : Sous les auvents rayés de vert et de blanc, ce café offre une parenthèse matinale empreinte de charme. Dès l’aube, les effluves de café au lait se mêlent aux arômes de beignets fraîchement frits, tandis que les omelettes moelleuses, garnies de produits locaux comme l’andouille ou les écrevisses, éveillent les papilles. Dans ce havre de tranquillité, le temps semble suspendu, invitant à savourer chaque bouchée au rythme apaisant du jazz en sourdine.
Un autre matin, direction Ruby Snipper Café, soul café, qui nous immerge dans le Sud avec ses plats typiques comme le poulet frit accompagné d’une gaufre et boule de vanille ou pourquoi pas écrevisses ou cochon avec des œufs Bénédicte ! Tout un programme !



Aujourd’hui c’est un grand jour car nous sommes très excités à l’idée de visiter l’antre de la création des chars et personnages géants par le Mardi Gras World.
C’est dans le fracas discret de la Grande Dépression qu’est née, presque par hasard, la fabrique des rêves du Mardi Gras. En 1932, Roy Kern, peintre de lettres sur barges, assemble avec son fils Blaine un premier char de parade, monté sur un chariot à ordures tiré par un mulet. Le point de départ d’une aventure singulière. Quelques coups de pinceau plus tard, une fresque offerte à un hôpital attire l’attention d’un chirurgien, capitaine d’un krewe (confrérie associée à des carnavals.) L’invitation est lancée : créer un char pour le carnaval. Le reste appartient à l’histoire. En 1947, Kern Studios est fondé, et Blaine Kern devient peu à peu l’architecte visuel du carnaval moderne. Il traverse l’Europe, s’imprègne des fastes italiens, de la démesure espagnole, de l’élégance française, et rapporte à La Nouvelle-Orléans une nouvelle grammaire visuelle : celle des chars monumentaux, des figures animées, des cortèges conçus comme des opéras de rue. À lui seul, il a façonné l’esthétique des plus grands krewes — Rex, Zulu, Bacchus — et demeure, aujourd’hui encore, dans les mémoires comme “Mr. Mardi Gras”, l’homme qui transforma une tradition en spectacle total.

Enfin une halte gourmande au Brennan’s. Derrière les volets rouges du 417 Royal Street, cet établissement distille depuis 1946 l’élégance créole dans ce qu’elle a de plus raffiné. Sous les hauts plafonds et les lustres d’époque, on déguste des œufs Sardou nappés de hollandaise, des tortues à la mode de la Nouvelle-Orléans, des crabes mous frits ou encore un canard rôti à la figue et au jus de canne. Et que serait un repas sans le légendaire Bananas Foster, flambé à la table, en hommage à l’exubérance sucrée du Sud ? Un déjeuner ici, c’est comme tourner les pages d’un roman de famille dont chaque plat serait un chapitre. Il vaut mieux y venir le ventre vide !


Après avoir dégusté le célèbre Sazerac au Monteléone — un hôtel emblématique de La Nouvelle-Orléans dont le bar, en forme de carrousel, tourne lentement sur lui-même — difficile de ne pas penser à l’histoire de ce cocktail iconique. Né dans le French Quarter, il trouve ses origines dans les anciens coffee houses de la ville, où l’on servait ce mélange audacieux de rye, d’absinthe et de bitters, devenu depuis une véritable institution.
La tête dans les nuages, nous allons dîner au Hersaint.
Au fil des saisons et des arrivages du Golfe, Herbsaint tisse un dialogue subtil entre Louisiane et Méditerranée. Dans un décor sobre et feutré de St. Charles Avenue, la cuisine du chef Tyler Spreen, sous l’impulsion de Donald Link, revisite les classiques du Sud avec des inflexions françaises et italiennes. Produits locaux, assiette ciselée, cave éclairée : une adresse rare, primée et sans ostentation, où chaque plat raconte une terre et une exigence.


Le lendemain, quittant le tumulte de la ville et la ferveur du jazz, nous prenons la route qui longe le Mississippi jusqu’aux plantations de Destrehan et de Houmas House. Là, le paysage change. Le fleuve ralentit, les chênes s’inclinent, et le passé affleure à chaque détour. Destrehan, fondée en 1787, est la plus ancienne demeure créole encore debout dans cette vallée marquée par l’histoire. De ses galeries ombragées, on aperçoit les cicatrices d’un monde où s’érigeaient, côte à côte, raffinement architectural et violence systémique. C’est ici, en 1811, que fut jugée la plus vaste révolte d’esclaves jamais connue sur le sol américain — un épisode trop longtemps enfoui, désormais rappelé avec rigueur et dignité lors des visites. Dommage que la pluie nous accueille mais nous ressentons la palpitation de ce monde de l’époque !
Houmas, le faste de l’époque

Plus en amont, Houmas House, avec ses colonnes néo-grecques et ses jardins à l’européenne, exhibe une toute autre façade de cette mémoire : celle du faste des barons du sucre au XIXᵉ siècle. À son apogée, la plantation s’étendait sur plus de 12 000 acres et faisait travailler 750 esclaves. Le surnom de « Palais du Sucre » n’est pas une exagération, mais une vérité de pierre, de marbre et de silence. Aujourd’hui restaurée, la maison accueille les visiteurs entre tableaux d’époque, mobilier d’origine et expositions contextualisées. Une promenade parmi ses allées fleuries ne se fait jamais sans une forme de gravité : celle du regard lucide posé sur un passé somptueux, mais chargé.

Enfin nous irons naviguer sur les bayous à la recherche de ce monde étrange et aquatique où oiseaux de toutes sortes et alligators, oui oui, y ont trouvé refuge ! Ici les bayous s’étirent comme des veines d’eau stagnante entre les cyprès drapés de mousse, où le silence moite semble suspendre le temps. Entre brume et racines immergées, la nature y murmure une langueur sauvage, presque irréelle !
Nouvelle-Orléans : racines d’une ville-monde
avec le guide sur le bayou - © Luxe Magazine
Fondée en 1718 par les Français sur les terres marécageuses du Mississippi, puis façonnée tour à tour par les Espagnols, les Créoles et les Acadiens, La Nouvelle-Orléans s’est inventée au croisement des empires, des langues et des peuples. Ville carrefour, elle a vu naître les révoltes, la traite, le métissage, mais aussi une culture sans équivalent, faite de syncrétismes et de résilience. À chaque angle de rue, un pan de cette mémoire affleure : une plaque en fer forgé, un nom d’origine africaine, un air de jazz. Ici, l’histoire n’est pas figée — elle palpite sous les pierres, elle s’entend, elle se danse.
Fondée en 1718 par Jean-Baptiste Le Moyne de Bienville sur les rives basses et marécageuses du Mississippi, La Nouvelle-Orléans est le fruit d’un entrelacs colonial unique : française par naissance, espagnole par héritage, américaine par transition. Mais ce sont surtout les hommes et les femmes venus d’ailleurs — esclaves ou migrants, marchands ou exilés — qui en ont façonné l’âme. La ville est née de ces frictions : entre les codes du Vieux Continent et les réalités du Nouveau Monde, entre les chants liturgiques et les percussions africaines, entre ordre colonial et résistances souterraines.
Partout, la mémoire affleure lors de notre visite guidée: dans les allées du Garden District, les porches du Treme ou les fer forgés du Vieux Carré. Certains lieux en sont les pierres angulaires. La cathédrale Saint-Louis, silhouette blanche posée sur Jackson Square, rappelle l’ancrage catholique hérité de la France et de l’Espagne. L’Old Ursuline Convent, le plus ancien édifice de la ville, témoigne d’une présence religieuse dès le XVIIIᵉ siècle. Et le Cabildo, palais municipal d’inspiration espagnole, abrite encore les archives du passage de la Louisiane aux États-Unis. Rien ici ne s’efface : tout s’ajoute, se transforme, et compose, lentement, une ville palimpseste. Même la pharmacie d’époque située rue Royale exhale une époque révolue !
Preservation Hall
Préservation Hall - © Luxe magazine
Dans cette salle exiguë de la rue St. Peter, rien n’a changé depuis 1961 : ni les murs bruts, ni les bancs en bois patiné, ni le souffle sacré de la trompette. Plus qu’un lieu, le Preservation Hall est un sanctuaire, fondé pour honorer l’une des expressions les plus pures de l’art américain : le jazz traditionnel de La Nouvelle-Orléans. Chaque soir – plus de 350 fois par an – une formation issue d’un collectif de musiciens locaux y perpétue cette tradition vivante. Parmi eux, Wendell Brunious, trompettiste et chanteur à la lignée musicale illustre, incarne cette fidélité à la mélodie comme vecteur d’émotion. Héritier d’un son né avant l’amplification, il joue comme on parle : avec souffle, nuance et mémoire. Ici, chaque note porte l’écho d’une époque, mais surtout d’un héritage vivant.
Même si le bâtiment ne paye pas de mine, nous restons bluffés à l’intérieur par l’ambiance et le rythme qui se dégage. Debout ou assis, nous vibrons au même rythme, celui du jazz !
Bourbon Street, l’ivresse permanente d’une rue qui ne dort jamais
Bourbon Street - © Luxe magazine
À quelques pas, Bourbon Street déroule sa frénésie comme une scène ouverte, à ciel nocturne. C’est un théâtre de néons et de décibels, de verres à emporter – les fameux “go cups” – et de balcons surplombant la foule, comme autant de loges vibrantes. Ici, rien ne se ferme vraiment : ni les portes, ni les voix, ni les nuits. Fondée sur un nom royal, mais associée à tous les excès, cette rue légendaire pulse au rythme d’un carnaval permanent. On y croise l’exubérance, le rire, parfois le chaos, toujours la vie. Et dans ce tumulte organisé, certains repères demeurent : le Fritzel’s European Jazz Pub, doyen des clubs de jazz de la rue, où l’on s’attarde pour écouter un swing fidèle à ses origines ; ou le Maison Bourbon Jazz Club, l’un des rares à se consacrer exclusivement au jazz traditionnel. Tout change à La Nouvelle-Orléans, sauf peut-être la couleur, le bruit et la démesure joyeuse de Bourbon Street, qui semblent, elles, ne jamais dormir. Nous sommes attirés comme des papillons par la lumière, par ces mélodies de jazz et de blues et nous nous déhanchons au rythme des notes !
Frenchmen Street : là où le jazz bat encore à cœur nu
Un autre soir, à quelques rues seulement de l’agitation de Bourbon Street, nous nous dirigeons vers Frenchmen Street , qui vibre autrement. Dans ce couloir étroit du Faubourg Marigny, la musique n’est pas un décor : elle est une langue vivante, parlée chaque soir dans des clubs comme Snug Harbor ou The Spotted Cat. Ici, pas d’artifice — juste des musiciens, une proximité brute, et cette intensité authentique que seuls les lieux fréquentés par les locaux savent encore offrir. On aime cette proximité, cet engouement et cette ambiance bon enfant !
Muriel ‘s Jackson
Muriel’s restaurant - © Luxe magazine
Et puis, il y a ces haltes gourmandes qui prolongent le charme du Vieux Carré.
Nous choisissons Muriel’s Jackson Square, au 801 Chartres Street.
Il incarne à lui seul l’opulence discrète et le mystère vibrant de La Nouvelle-Orléans. Sous les voûtes de ce bâtiment historique, le chef Erik Veney signe une cuisine créole contemporaine, à la fois raffinée et généreuse. Nous nous laissons tenter par un canard rôti et une soupe de tortue au sherry ! À l’étage, dans le clair-obscur d’un salon privé, les convives s’immergent dans une atmosphère feutrée, presque hors du temps, où les murs semblent encore porter les éclats d’un passé fastueux. On dit que le propriétaire hante encore les lieux et une table dressée pour lui l’attend tous les soirs ! Nous nous attendons presque à voir trembler la table !
Creole Queen : une croisière sur le Mississippi au fil de l’histoire de La Nouvelle-Orléans
Créole Queen - © Luxe magazine
Croisière sur le Missisiipi - © Luxe magazine
Et puis, il y a le fleuve. Large, calme, indifférent, le Mississippi déroule ses eaux opaques comme une veine millénaire. Nous montons à bord de la Creole Queen, une majestueuse embarcation à aubes, qui nous entraîne pour une traversée du temps : deux heures trente de voyage commenté, porté par la voix d’un historien local, jusqu’aux terres silencieuses de Chalmette, théâtre de la bataille fondatrice de 1815. On y évoque les frères Le Moyne, la Louisiane française, le Tremé, quartier noir par excellence, Marigny, et cette mémoire toujours vivante, guidée par les mots des rangers du parc national Jean Lafitte. Dommage que les rives du Mississipi, ne portent plus l’imaginaire des plantations de l’époque, mais malheureusement les stigmates de notre époque !
Le Renaissane New Orleans Père Marquette
L'immeuble de l'hôtel Renaissance Père Marquette - © Renaissance Père Marquette
De retour en ville, nous posons nos valises au Renaissance New Orleans Pere Marquette French Quarter Area Hotel, refuge urbain, niché sur Common Street. Parfaitement situé entre les pulsations du Quartier Français et la verticalité du Central Business District, il offre une halte aux voyageurs en quête de confort. Chambres sobres relevées de clichés d’artistes locaux, service sympathique et un bar où l’on croise aussi bien les hommes d’affaires que les mélomanes fatigués.
Pour une petite faim nous descendons au Tacklebox pour y déguster des huîtres au bar avant de se laisser porter par le Quartier Français et ses rythmes jazzy !
Café Beignet : douceur matinale au rythme du jazz
Café Beignet - © Luxe magazine
Au petit matin direction Café Beignet : Sous les auvents rayés de vert et de blanc, ce café offre une parenthèse matinale empreinte de charme. Dès l’aube, les effluves de café au lait se mêlent aux arômes de beignets fraîchement frits, tandis que les omelettes moelleuses, garnies de produits locaux comme l’andouille ou les écrevisses, éveillent les papilles. Dans ce havre de tranquillité, le temps semble suspendu, invitant à savourer chaque bouchée au rythme apaisant du jazz en sourdine.
Un autre matin, direction Ruby Snipper Café, soul café, qui nous immerge dans le Sud avec ses plats typiques comme le poulet frit accompagné d’une gaufre et boule de vanille ou pourquoi pas écrevisses ou cochon avec des œufs Bénédicte ! Tout un programme !
Ruby Snipper Café - © Luxe magazine
Mardi Gras World : là où naissent les cortèges du rêve
Mardi Gras World - © Luxe magazine
Mardi Gras World - © Luxe magazine
Aujourd’hui c’est un grand jour car nous sommes très excités à l’idée de visiter l’antre de la création des chars et personnages géants par le Mardi Gras World.
C’est dans le fracas discret de la Grande Dépression qu’est née, presque par hasard, la fabrique des rêves du Mardi Gras. En 1932, Roy Kern, peintre de lettres sur barges, assemble avec son fils Blaine un premier char de parade, monté sur un chariot à ordures tiré par un mulet. Le point de départ d’une aventure singulière. Quelques coups de pinceau plus tard, une fresque offerte à un hôpital attire l’attention d’un chirurgien, capitaine d’un krewe (confrérie associée à des carnavals.) L’invitation est lancée : créer un char pour le carnaval. Le reste appartient à l’histoire. En 1947, Kern Studios est fondé, et Blaine Kern devient peu à peu l’architecte visuel du carnaval moderne. Il traverse l’Europe, s’imprègne des fastes italiens, de la démesure espagnole, de l’élégance française, et rapporte à La Nouvelle-Orléans une nouvelle grammaire visuelle : celle des chars monumentaux, des figures animées, des cortèges conçus comme des opéras de rue. À lui seul, il a façonné l’esthétique des plus grands krewes — Rex, Zulu, Bacchus — et demeure, aujourd’hui encore, dans les mémoires comme “Mr. Mardi Gras”, l’homme qui transforma une tradition en spectacle total.
Brennan’s : élégance créole et traditions gourmandes sur Royal Street
Restaurant Herbsaint - © Luxe magazine
Enfin une halte gourmande au Brennan’s. Derrière les volets rouges du 417 Royal Street, cet établissement distille depuis 1946 l’élégance créole dans ce qu’elle a de plus raffiné. Sous les hauts plafonds et les lustres d’époque, on déguste des œufs Sardou nappés de hollandaise, des tortues à la mode de la Nouvelle-Orléans, des crabes mous frits ou encore un canard rôti à la figue et au jus de canne. Et que serait un repas sans le légendaire Bananas Foster, flambé à la table, en hommage à l’exubérance sucrée du Sud ? Un déjeuner ici, c’est comme tourner les pages d’un roman de famille dont chaque plat serait un chapitre. Il vaut mieux y venir le ventre vide !
New Orleans Jazz Museum : le cœur battant du jazz, là où tout a commencé
On ne peut pas venir à la Nouvelle Orléans sans visiter son Musée du Jazz ! Dans l’ancienne Monnaie des États-Unis, au croisement vibrant du Quartier Français et de Frenchmen Street, le New Orleans Jazz Museum fait plus qu’exposer : il donne à entendre, à ressentir, à comprendre le jazz dans sa ville natale. Ici, les partitions dialoguent avec les objets, les archives s’animent au rythme des jam sessions, et les générations se croisent autour d’une mémoire toujours vivante. Un lieu habité, où le passé s’improvise au présent.Plantation Destrehan - © Destrehan
Herbsaint : l’élégance franco-sudiste sur St. Charles Avenue
Restaurant Herbsaint - © Luxe magazine
Après avoir dégusté le célèbre Sazerac au Monteléone — un hôtel emblématique de La Nouvelle-Orléans dont le bar, en forme de carrousel, tourne lentement sur lui-même — difficile de ne pas penser à l’histoire de ce cocktail iconique. Né dans le French Quarter, il trouve ses origines dans les anciens coffee houses de la ville, où l’on servait ce mélange audacieux de rye, d’absinthe et de bitters, devenu depuis une véritable institution.
La tête dans les nuages, nous allons dîner au Hersaint.
Au fil des saisons et des arrivages du Golfe, Herbsaint tisse un dialogue subtil entre Louisiane et Méditerranée. Dans un décor sobre et feutré de St. Charles Avenue, la cuisine du chef Tyler Spreen, sous l’impulsion de Donald Link, revisite les classiques du Sud avec des inflexions françaises et italiennes. Produits locaux, assiette ciselée, cave éclairée : une adresse rare, primée et sans ostentation, où chaque plat raconte une terre et une exigence.
Le fameux plat Combo de la Louisiane - © Luxe magazine
Destrehan et Houmas House : les cicatrices majestueuses du fleuve
Plantation Destrehan - © Destrehan
Le lendemain, quittant le tumulte de la ville et la ferveur du jazz, nous prenons la route qui longe le Mississippi jusqu’aux plantations de Destrehan et de Houmas House. Là, le paysage change. Le fleuve ralentit, les chênes s’inclinent, et le passé affleure à chaque détour. Destrehan, fondée en 1787, est la plus ancienne demeure créole encore debout dans cette vallée marquée par l’histoire. De ses galeries ombragées, on aperçoit les cicatrices d’un monde où s’érigeaient, côte à côte, raffinement architectural et violence systémique. C’est ici, en 1811, que fut jugée la plus vaste révolte d’esclaves jamais connue sur le sol américain — un épisode trop longtemps enfoui, désormais rappelé avec rigueur et dignité lors des visites. Dommage que la pluie nous accueille mais nous ressentons la palpitation de ce monde de l’époque !
Houmas, le faste de l’époque
chambre de la plantation Houmos - © Luxe magazine
Plus en amont, Houmas House, avec ses colonnes néo-grecques et ses jardins à l’européenne, exhibe une toute autre façade de cette mémoire : celle du faste des barons du sucre au XIXᵉ siècle. À son apogée, la plantation s’étendait sur plus de 12 000 acres et faisait travailler 750 esclaves. Le surnom de « Palais du Sucre » n’est pas une exagération, mais une vérité de pierre, de marbre et de silence. Aujourd’hui restaurée, la maison accueille les visiteurs entre tableaux d’époque, mobilier d’origine et expositions contextualisées. Une promenade parmi ses allées fleuries ne se fait jamais sans une forme de gravité : celle du regard lucide posé sur un passé somptueux, mais chargé.
Un alligator en voisin dans le bayou - © Luxe Magazine
Enfin nous irons naviguer sur les bayous à la recherche de ce monde étrange et aquatique où oiseaux de toutes sortes et alligators, oui oui, y ont trouvé refuge ! Ici les bayous s’étirent comme des veines d’eau stagnante entre les cyprès drapés de mousse, où le silence moite semble suspendre le temps. Entre brume et racines immergées, la nature y murmure une langueur sauvage, presque irréelle !
Juin 2025
Par Katya PELLEGRINO