"Otokô La beauté des hommes"
Avec Otokô La beauté des hommes - fragments de corps, l'espace Shiseido La Beauté de Paris confirme une tendance toute récente : la mise en scène, au sens propre, du corps des hommes.
Mais pour ce travail réalisé sur la demande de Shiseido par la styliste japonaise Mika Mizutani avec des images réalisées par le photogaraphe Takay, il s'agit du regard d'une femme qui entre en jeu.
Et, sous ce regard, le corps de l'homme change.
Si, depuis longtemps, on a dénudé le corps des femmes dans la mode et la publicité, celui de l'homme ne l'a été que plus récemment. Et les images qui en furent données sont souvent celles d'une virilité sans nuance, celles d'athlètes à la forte musculature et au regard vide. Est-ce ainsi que les hommes se voient, qu'ils se persuadent qu'un vêtement ou un parfum les rend irrésistibles ?
Son regard n'est pas celui des publicitaires
Alors que, depuis de nombreuses années, Mika Mizutani a créé des images pour de grandes marques internationales en tenant compte de leur style, elle a cette fois carte blanche, toute liberté pour s'exprimer en tant qu'artiste, au Studio de Shiseido La Beauté.
Son regard n'est pas celui des publicitaires. Les puissantes épaules ne l'attirent pas plus que la couleur forcée des éternels bronzages. En choisissant des modèles à peine sortis de l'adolescence, elle attire l'attention sur leur grain de peau très lisse, la courbe tendre de leurs bouches, la ligne déliée de leurs cous et de leurs hanches plus émouvants, selon elle, que ceux de leurs aînés. Elle décide alors de n'utiliser que le noir et le blanc pour mieux rendre le léger renflement d'une veine, le creux mystérieux d'un nombril, le pli naissant d'une ride, l'ombre d'un menton sur une pomme d'Adam, la forme sculptée d'une cheville. Recherche-t-elle des signes de féminité chez ces jeunes hommes, ou a-t-elle envie d'explorer une autre séduction, une autre sensibilité ?
La démarche d'une artiste
Le premier pas a consisté à expliquer sa démarche au photographe Takay, à lui décrire cette sensualité différente qu'elle veut capter. Elle ne 'est pas contentée de diriger ses modèles, de les mettre en scène. C'est un dialogue, une véritable collaboration qui sest établie entre elle et le photographe pour déterminer le cadrage de chaque fragment de corps et, parfois, l'approcher grâce au zoom à travers l'œil de la chambre 4x5 made' in Japan.
En peu de temps, Takay lui-même, qui mène une double carrière de photographe de mode et d'artiste exposé dans des galeries japonaises et européennes, apprend à voir autrement.
Emerveillés par la qualité du noir et blanc
Lorsque les photographies sont développées, tous deux sont émerveillés par la qualité du noir et blanc, si subtil avec ses matités et ses brillances, et si riche qu'il semble contenir des gris, des bruns, des tons de sanguine. Ici, une bouche paraît dessinée au crayon, là des poils ou une mèche de cheveux ont la finesse d'un trait de plume.
Le travail avec les modèles est, lui aussi, d'un ordre différent de celui auquel ils sont habitués. A aucun moment, Mika Mizutani ne leur a demandé les attitudes provocantes, lascives ou ambiguës des magazines. Elle veut seulement qu'ils soient concentrés, à l'écoute d'eux-mêmes. Certains ont alors une expression plus grave, un autre doit fermer les yeux pour oublier une trop grande certitude de son apparence. Comme un masque, ses paupières baissées lui permettent de se sentir libre, de se montrer sans pudeur, mais aussi sans arrogance, un peu comme dans un rêve.
Otoko signifie l'être mâle dans sa force tellurique
A partir du 1er février 2004, ces photographies de 1,40 x 1 mètre ont été exposées au Studio Shiseido La Beauté, dans un espace volontairement restreint afin que les spectateurs puissent être au plus près de la texture des corps.
Dans cette sorte de couloir, on entend un battement de cœur qui évoque celui perçu par l'enfant dans le ventre de sa mère. Ainsi l'homme revient à la femme. Et la femme découvre un homme plus proche de celui qui habite ses fantasmes, à la fois doux, fort et vulnérable, qu'elle a envie d'aimer. Il correspond au mot japonais otoko qui signifie l'être mâle dans sa force tellurique, qui titre l'exposition.
L'intelligente douceur du film "Après la pluie"
On retrouve grâce à cette approche de Mika Mizutani l'intelligente douceur du film "Après la pluie", écrit par Akira Kurosawa et réalisé peu après sa mort par son disciple Takashi Koizumi. On y retrouve le regard doux et profond de Tayo, la femme de l'émouvant et pacifique ronin Ihei Mizawa.
II est remarquable ici que ce soit une femme qui fasse naître des images qui expriment une nouvelle façon de montrer la beauté masculine et un rapport plus équilibré et plus épanouissant entre les hommes et les femmes.
(documentation Shiseido)
Et, sous ce regard, le corps de l'homme change.
Si, depuis longtemps, on a dénudé le corps des femmes dans la mode et la publicité, celui de l'homme ne l'a été que plus récemment. Et les images qui en furent données sont souvent celles d'une virilité sans nuance, celles d'athlètes à la forte musculature et au regard vide. Est-ce ainsi que les hommes se voient, qu'ils se persuadent qu'un vêtement ou un parfum les rend irrésistibles ?
Alors que, depuis de nombreuses années, Mika Mizutani a créé des images pour de grandes marques internationales en tenant compte de leur style, elle a cette fois carte blanche, toute liberté pour s'exprimer en tant qu'artiste, au Studio de Shiseido La Beauté.
Son regard n'est pas celui des publicitaires. Les puissantes épaules ne l'attirent pas plus que la couleur forcée des éternels bronzages. En choisissant des modèles à peine sortis de l'adolescence, elle attire l'attention sur leur grain de peau très lisse, la courbe tendre de leurs bouches, la ligne déliée de leurs cous et de leurs hanches plus émouvants, selon elle, que ceux de leurs aînés. Elle décide alors de n'utiliser que le noir et le blanc pour mieux rendre le léger renflement d'une veine, le creux mystérieux d'un nombril, le pli naissant d'une ride, l'ombre d'un menton sur une pomme d'Adam, la forme sculptée d'une cheville. Recherche-t-elle des signes de féminité chez ces jeunes hommes, ou a-t-elle envie d'explorer une autre séduction, une autre sensibilité ?
Le premier pas a consisté à expliquer sa démarche au photographe Takay, à lui décrire cette sensualité différente qu'elle veut capter. Elle ne 'est pas contentée de diriger ses modèles, de les mettre en scène. C'est un dialogue, une véritable collaboration qui sest établie entre elle et le photographe pour déterminer le cadrage de chaque fragment de corps et, parfois, l'approcher grâce au zoom à travers l'œil de la chambre 4x5 made' in Japan.
En peu de temps, Takay lui-même, qui mène une double carrière de photographe de mode et d'artiste exposé dans des galeries japonaises et européennes, apprend à voir autrement.
Lorsque les photographies sont développées, tous deux sont émerveillés par la qualité du noir et blanc, si subtil avec ses matités et ses brillances, et si riche qu'il semble contenir des gris, des bruns, des tons de sanguine. Ici, une bouche paraît dessinée au crayon, là des poils ou une mèche de cheveux ont la finesse d'un trait de plume.
Le travail avec les modèles est, lui aussi, d'un ordre différent de celui auquel ils sont habitués. A aucun moment, Mika Mizutani ne leur a demandé les attitudes provocantes, lascives ou ambiguës des magazines. Elle veut seulement qu'ils soient concentrés, à l'écoute d'eux-mêmes. Certains ont alors une expression plus grave, un autre doit fermer les yeux pour oublier une trop grande certitude de son apparence. Comme un masque, ses paupières baissées lui permettent de se sentir libre, de se montrer sans pudeur, mais aussi sans arrogance, un peu comme dans un rêve.
A partir du 1er février 2004, ces photographies de 1,40 x 1 mètre ont été exposées au Studio Shiseido La Beauté, dans un espace volontairement restreint afin que les spectateurs puissent être au plus près de la texture des corps.
Dans cette sorte de couloir, on entend un battement de cœur qui évoque celui perçu par l'enfant dans le ventre de sa mère. Ainsi l'homme revient à la femme. Et la femme découvre un homme plus proche de celui qui habite ses fantasmes, à la fois doux, fort et vulnérable, qu'elle a envie d'aimer. Il correspond au mot japonais otoko qui signifie l'être mâle dans sa force tellurique, qui titre l'exposition.
On retrouve grâce à cette approche de Mika Mizutani l'intelligente douceur du film "Après la pluie", écrit par Akira Kurosawa et réalisé peu après sa mort par son disciple Takashi Koizumi. On y retrouve le regard doux et profond de Tayo, la femme de l'émouvant et pacifique ronin Ihei Mizawa.
II est remarquable ici que ce soit une femme qui fasse naître des images qui expriment une nouvelle façon de montrer la beauté masculine et un rapport plus équilibré et plus épanouissant entre les hommes et les femmes.
(documentation Shiseido)
Avril 2004
Par Sawako TAKAHASHI