Culture


Sylvie Vartan meneuse de Revue de Mode au Musée Galliera

"Je serais la plus belle pour aller danser..." Comme le prouve l'exposition Sylvie Vartan / Revue de mode qui vient d'ouvrir au Musée Galliera elle ne trompait personne la petite chanteuse yé-yé qui fut l'idole des jeunes dans les années 60. Elle faisait tout pour être la plus belle !
En mettant en scène les tenues de ville et de scène que réalisèrent pour elle les plus grands couturiers, l'exposition déroule le film d'une époque où "les moins de vingt ans", pour la première fois, ont pris la parole.
Chanteuse, mais aussi cover-girl et styliste

Plus que toute autre idole de la chanson française, Sylvie Vartan a occupé la scène de la mode depuis la naissance de l'ère yé-yé en 1961. Aussi bien comme cover-girl - elle fait la couverture de nombreux numéros de Elle et de Vogue et pose pour les pages mode de magazines féminins - que comme styliste, car la chanteuse a lancé sa propre marque de prêt-à-porter en 1965.
Très vite Sylvie Vartan choisit la Haute Couture à la scène comme à la ville : successivement, Yves Saint Laurent, Marc Bohan et Gianfranco Ferre pour Dior, ou Jean Paul Gaultier créent pour elle des modèles exclusifs.
La première à se produire dans des shows à l'américaine qu'elle introduit en France, elle fait alors appel au costumier Michel Fresnay puis au new-yorkais Bob Mackie dont les tenues se prêtent à ses chorégraphies spectaculaires.

Une étonnante plasticité

Le Musée Galliera met en lumière le parcours de mode de Sylvie Vartan à travers quelque 80 tenues de scène et de ville.
Projections de films, photographies, couvertures de magazine, affiches publicitaires et pochettes de disque complètent cet ensemble.
Elle épouse l'autre idole des jeunes, Johnny Hallyday le 12 avril 1965. Rocker rebelle dans le civil, mais aussi le sergent Jean-Philippe Smet à l'armée, il ne se laissera pas mettre "en cage à Médrano" pour ses idées courtes, comme le chantait Antoine, adepte des chemises à fleurs. Avec Sheila, Françoise Hardy, Eddy Mitchell ou Claude François, ils enflamment "l'âge tendre" et les "têtes de bois" qui feront ensuite sauter bien d'autres normes culturelles quelques années plus tard...
On pouvait penser qu'Antoine, Dutronc, Gainsbourg ou autre Julien Clerc les repousseraient dans l'ombre, mais ils ont su avec une étonnante élasticité absorber la révolte estudiantine. Sylvie Vartan en est l'exemple le plus frappant : du yéyé à nos jours, en passant par les années disco et 80, elle a traversé tous ces mouvements musicaux avec beaucoup de succès. Avec la même étonnante plasticité une génération de femmes a adopté son style, ses vêtements et ses coiffures.

Sylvie fait la Mode

"Pour la première fois, analyse Daniel Filipacchi, cité dans le catalogue de l'exposition, "un monde établi et mené par les plus de vingt ans, les moins de vingt ans ont droit à la parole. Ce sont eux qui créent les nouvelles idoles, eux qui orientent les marchés, qui forcent la publicité à modifier son style et ses hameçons, qui bousculent tout le système des valeurs, eux qui font que ça bouge, que ça vibre, que ça brûle !" (Elle, n°893, 1er février 1965).
En moins de cinq ans, les adolescents inondent la presse. Pas seulement la presse qui leur est consacrée et qui vient de naître sous l'impulsion de Daniel Filipacchi, mais également les magazines féminins traditionnels comme Elle et Marie Claire, destinés à la classe moyenne.
Tout à coup, les valeurs s'inversent. Les codes proposés ne sont plus ceux des mères mais ceux des filles.
De 1965 à 1970, Sylvie Vartan lance avec son amie Mercedes Calmel sa propre marque de prêt-à-porter. Christiane Bailly et Emmanuelle Khanh collaborent à cette entreprise. Le premier magasin "Sylvie Vartan ouvre ses portes, avenue Victor Hugo, à Paris. Conçu par l'architecte Christian Girard, il inaugure une nouvelle génération de magasins ancêtres de nos "concept stores". De nombreuses boutiques suivent en province et à l'étranger.
En 1968, elle se voit confier les uniformes des hôtesses des JO d'hiver de Grenoble. Parallèlement sont créés de nombreux accessoires : chaussures (Myrys, André), Lunettes, Montres (Kelton).
Sylvie est son meilleur mannequin : elle pose avec ses créations qui illustrent pochettes de disque et articles.

Le changement de registre

A partir du tournant des années 70, les personnages qu'incarne Sylvie Vartan sont fondés sur les registres de la séduction, du charme, du glamour : dès 1969, les clichés de Jean-Loup Sieff pour Vogue la présentent comme une femme sûre d'elle-même qui mène énergiquement sa carrière : "Lionne superbe, elle porte avec maestria les nouvelles combinaisons de cuir zippées, folies de cet hiver." (Vogue, n° 501, novembre 1969). L'année suivante, Helmut Newton la photographie en Yves Saint Laurent Rive Gauche (Elle, n° 1305, 21 décembre 1970), cette image illustre également une pochette de disque. Sylvie Vartanpose ensuite à plusieurs reprises en Yves Saint Laurent pour Vogue, une photographie de Guy Bourdin (Vogue, n° 544, mars 1974) publiée en couverture donne l'image d'une femme distante et mystérieuse.
Elle donne aussile ton pour les coiffures : un film publicitaire de 1970 et une série de photographies présentent les différentes coiffures portées par Sylvie Vartan. Styles éphémères ou emblématiques de son personnage créés par Elrhodes, Carita... autant de looks adoptés par de nombreuses femmes et représentatifs de plusieurs époques.

"Sylvie c'est ELLE"

Le titre de l'exposition est bien choisi : c'est à une véritable revue de mode de la fin du XXème siècle à laquelle assiste le visiteur en suivant cette cover-girl exemplaire.
Le nombre et la variété des couvertures de journaux de mode où la chanteuse est représentée fait que l'on peut se demander si l'on n' a pas plutôt affaire ici au parcours d'un mannequin qui aurait aussi été, accessoirement, chanteuse...
Une sélection parmi les nombreuses couvertures du magazine Elle dont Sylvie a été l'une des "ambassadrices", enrichie de plusieurs couvertures de Vogue et de L'Officiel de la couture, forme une longue frise déroulée dans la grande galerie du musée.
De la "petite collégienne du Twist" à la meneuse de revue en passant par la femme fatale ou la jeune mariée la revue de mode est complète.

"J'étais tellement admirative..."

De cette longue carrière dans la mode, la chanteuse a gardé un profond sentiment de respect pour l'art de la Haute Couture et le travail de création. Elle confie dans une interview rapportée dans le catalogue de l'exposition : "Je suis très attachée à mes robes, en partie grâce à Yves Saint Laurent. J'étais tellement admirative, fascinée par le travail qu'effectuaient les premières d'atelier, les assistants, les petites mains, que j'ai toujours traité ces vêtements avec beaucoup de soin.
Toutes mes tenues sont encore en bon état malgré ce qu'elles ont subi pendant les spectacles. J'avais toujours peur de les abîmer, je les voyais comme des bijoux. J'avais aussi conscience que mes costumes avaient nécessité un travail énorme : toutes ces paillettes cousues une à une sur mes combinaisons, c'est un travail d'orfèvre, de la folie..."
Octobre 2004
Par Yves CALMEJANE
Musée Galliera, musée de la Mode de la Ville de Paris
10, avenue Pierre 1er de Serbie
75116 Paris
tél : 01.56.52.86.00
www.paris.fr/musées

Scénographie :Philippe Renaud, Anne Behr

Un catalogue édité par Paris-Musées accompagne l'exposition

  • Un parcours-jeux est spécialement conçu dans l'exposition pour le jeune public à partir de 4 ans
    les années 60 : une adolescente modèle