Les enjeux de l'Azerbaïdjan vu par son ambassadeur
L'Azerbaïdjan, terre de feu
Aux confins de l'Europe, l'Azerbaïdjan, cerné par la Russie, la Géorgie, l'Arménie et l'Iran, s'étend sur une large partie du sud-est du Caucase. 86 600 km² pour 9,8 millions d'habitants, ce pays est à peine plus petit que le Portugal.
Gigantesque carrefour où convergent les grands axes Orient-Occident, Nord- Sud, l'Azerbaïdjan, connu entre autres pour ses incommensurables ressources en hydrocarbures (pétrole, gaz), est devenu un état démocratique depuis 91. Enjeux économique, énergétiques sont les maîtres-mots pour ce pays en passe de se hisser au rang des grandes puissances mondiales.
L'Azerbaïdjan est doublement attractif. D'une part comme fournisseur d'hydrocarbures avec l'exploitation de son pétrole dont il est dépendant sur la mer Caspienne (70 % de ses exportations) mais aussi et surtout d'autre part, parce qu'il occupe une remarquable position géostratégique à l'heure où l'économie mondiale bascule vers l'Est.
Toutes les voies marines d'Azerbaïdjan commencent à Bakou, le plus grand port de la mer Caspienne et la base de la marine marchande azerbaïdjanaise.
Le fait d'être cerné par la Russie, la Géorgie, l'Arménie et l'Iran, confère t'il à l'Azerbaïdjan, une richesse et une pluralité culturelle ?
Oui bien entendu. La culture de l'Azerbaïdjan a été influencée par les cultures persane, islamique et européenne. Au VIII siècle la religion musulmane était dominante et nous avons subi l'invasion des turcs au X et Xème siècles, ce qui explique que notre langue "azari" soit la plus parlée (plus de 90 %) et appartient à la famille altaïque (langue turcique).
Depuis le XVIIIe siècle, quand l'Azerbaïdjan est devenu partie de l'Empire russe, et de l'Union soviétique, il a été fortement influencé par la culture occidentale, ce qui lui confère une richesse pluri-culturelle ainsi qu'une identité forte dont les azeris peuvent s'enorgueillir.
Cette influence pluri-culturelle se retrouve à tous les niveaux : artisanat, architecture, art, littérature, musique mugham...
L'Azerbaïdjan, un état démocratique de 1918 à 1920
Il faut savoir que l'Azerbaidjan fut un état indépendant durant un laps de temps très court, (1918/1920) avec une démocratie parlementaire.
C'était révolutionnaires à l'époque, notamment en Orient, avec de surcroît le droit de vote pour les femmes.
Notre état était laïque et la religion séparée de l'état. Nous étions ainsi la première république dans cette partie du monde.
Malheureusement, notre indépendance n'a duré qu'à peine deux ans et notre gouvernement s'est alors expatrié en France. Une partie des membres y est d'ailleurs enterrée, ce qui explique nos relations avec la France.
En avril 1920 nous sommes retournés sous le joug communiste durant près de 70 ans, ce qui a eu des conséquences culturelles, sociales et économiques très fortes.
Par exemple, sur le plan économique, nos ressources étaient exploitées et redistribuées par l'URSS.
IL faut savoir qu'en 1912, Bakou produisait 75 % du pétrole mondial !
Sur le plan énergétique, nous étions gênés de n'exploiter que cette ressource et nous voulions nous développer et créer d'autres axes de développement, sachant qu'un jour cette source serait tarie. Ce qu'on appelle le "dutch disease"
C'est pourquoi, depuis une dizaine d'années, le gouvernement développe également d'autres domaines et investit dans l'environnement, la politique agricole (avec la Bourgogne par exemple), l'aéro spatial, premier satellite de communication d'Azerbaïdjan, avec Ariane Espace, qui va être lancé à Kourou en 2013.
Nous avons toujours été un pays ouvert sur l'Ouest.
Quels sont vos atouts pour attirer une clientèle française ?
Nous possédons une diversité climatique exceptionnelles avec 9 zones sur 12 dans le monde ainsi qu' une diversité culturelle comme je vous l'ai déjà dit : artisanat, gastronomie, proximité avec les pays limitrophes, culture. Par exemple des monuments historiques, vestiges de notre passé très riche d'histoire, trouvent leurs fondements dans les temps les plus reculés de l'humanité.
Carrefour stratégique entre l'Orient et l'Occident, notre pays a suscité à travers les époques, nombre de convoitises dans le monde et d'invasions et ces monuments en sont les symboles.
Nous avons également une faune et une flore exceptionnelle ainsi qu'une biodiversité unique en Europe. Plus de 12000 espèces animales et plus de 4000 variétés de plante.
Une tolérance vis à vis de toutes les minorités. Un pays musulman certes, mais pas intégriste, où les femmes ne circulent pas voilées, où les chrétiens et orthodoxes peuvent pratiquer leur religion; un état qui appartient à la conférence islamique, et qui accueille sur son sol une ambassade d’Israël.
Une gastronomie diversifiée : La diversité du climat fait que la cuisine azerbaïdjanaise est très colorée et grâce à la richesse culturelle, des circuits touristiques intéressants ainsi une hôtellerie confortable et de luxe.
Peut-on considérer que Bakou est devenue une destination haut de gamme grâce aux groupes hôteliers comme Park Hyatt, Four Seasons, Radisson Blue, Marriot....?
Oui je pense que l'on peut parler de destination haut de gamme depuis 2012 et surtout depuis l'Eurovision.
Nous allons continuer à développer les infrastructures hôtelières jusqu'en 2015, puisque nous aurons les premiers Jeux Olympiques européens cette année là.
Un autre atout qui va attirer, je pense nombre de touristes, concerne notre première station de ski qui verra le jour fin 2013 et qui sera construite par des sociétés suisses et autrichiennes.
Ce sera la première création d'un resort, qui fonctionnera été comme hiver.
Une seconde station sera construite fin 2013.
Vers quelles autres industries vous tournez-vous pour vous développer ?
Nous développons la pétrochimie, les ressources humaines et nous investissons dans les écoles et dans l'éducation.
Les liens économiques entre l'Azerbaïdjan et la France sont d'ailleurs forts, notamment dans les activités pétrolières et gazières, mais aussi dans l'environnement et les transports. Votre ancien président, Nicolas Sarkozy a signé deux accords portant l’un sur la création du Lycée Français de Bakou, l’autre sur les modalités d’intervention de l’Agence Française de Développement en Azerbaïdjan
Le gouvernement mène t'il une politique d'ouverture pour des investisseurs étrangers ?
Oui. dès la restauration de l'indépendance, nous avons eu une politique d'ouverture avec les compagnies étrangères. Notamment pour la production de pétrole grâce à la coopération du consortium BP, Total, State Oil, Amoco, qui à l'époque nous ont aidé sur le plan de l'infrastructure.
Il nous a fallu construire d'autres routes, pour ne plus avoir à passer sur la seule route qui traversait la Russie. Notre président de l'époque a convaincu Bill Clinton, 85 % de notre production etant exportée via les routes occidentales.
Idem pour le gaz.
Une indépendance chèrement acquise !
Nous avons payé de notre sang notre indépendance et notre identité, ce qui n'est pas un vain mot chez nous.
Car il faut savoir qu'en 90, les chars russes encerclaient Bakou et on tiré à la mitrailleuse sur plus de 135 résistants azeris qui ont payé ainsi de leur vie ! Ce fut un véritable assassinat !
Quels sont les enjeux de l'Azerbaidjan moderne ?
Nous souhaitons nous rapprocher de l'Europe, de l'Otan et nous sommes prêts à contribuer à la sécurité énergétique de l'Europe, entre autres.
Nous souhaitons également trouver des solutions pacifiques avec certains de nos voisins avec lesquels nous avons des tensions (Iran) et régler le problème des 20 % de territoire occupé par l'Arménie (où vivent 1 million d'habitants azeris devenus réfugiés). Ces difficultés freinent l'expansion dans toute la région.
Continuer notre développement économique, et une politique de rapprochement Est/Ouest.
Nous avons de ce fait créé une niche avec une plate-forme de dialogue inter-culturel. Ce forum a été lancé l'année dernière et nous le renouvelons cette année en invitant des personnalités dans des domaines très diversifiés (scientifique, littéraires, économiques, politiques, média...)
. Enfin nous voulons établir des relations bilatérales et développer des partenariats stratégiques, notamment avec la France.
En un mot "devenir citoyen européen" !
Et quelle est votre force ?
Le sens des réalités et les pieds sur terre.
Nous avons trouvé notre modèle économique en jouant sur la diversité et en souhaitant faire partie des démocraties européennes.
Nous sommes indépendants économiquement, et menons nos enjeux économiques et politiques, ce qui n'est pas le cas, par exemple de l'Arménie, qui est certes un pays indépendant, mais dépendant sur le plan de ses ressources, dont 75 % appartiennent aux russes.
Un message particulier à adresser aux lecteurs du monde ?
Oui, lorsque nous voyons ce qui se passe actuellement avec ce défi de terrorisme, nous souhaitons la paix et la stabilité dans le monde, et vivre en harmonie avec nos voisins et partenaires, pour le plus grand bien de l'humanité.