Alain Ducasse at the Dorchester
Un esprit palace
Il reste très peu d'établissements, comme le Dorchester, ayant su conserver leur esprit palace. Véritable institution datant de 1931, il a su traverser les décennies, préservant ses propres codes de séduction, distillant le glamour et l'élégance des années 50, pour les personnalités qui le fréquentent. A mille lieues de l'esprit minimal et épuré qui anime notre XXIème siècle.
Cossu avec ses lits à baldaquin et ses moquettes moelleuses, riche dans sa décoration avec marbre, meubles de chêne, ou de bois de fruitier, le service très haut de gamme est sans faille.
On petit-déjeune à la Promenade, de style rococo et baroque, en compagnie de personnel en queue de pie. De style théâtral, cette galerie reflète l'esprit cossu et chargé de l'hôtel : profusion de drapés de soie colorés aux murs, opulence de tissus chatoyants et de coussins rebondis sur des Chesterfield façon XXIème siècle, assises circulaires, colonnes de marbre. Le décor est planté. Le high-tea est également un grand moment, servi dans les traditions victoriennes.
On grignote au Grill Room et on dîne surtout au nouveau Alain Ducasse at The Dorchester.
Alain Ducasse at the Dorchester : un fine dining
Résolument contemporain dans son design et dans son approche du décor, Alain Ducasse a souhaité faire un exercice de style en rupture avec l'esprit classique du Dorchester.
Un cocon dans les notes beige et ivoire, des matériaux nobles comme le cuir, le bois et le coton, des salons intimes où un feuillage en tissu vert sur les murs évoque Hyde Park non loin, et au centre de la salle, la touche de Patrick Jouin, "la table Lumière". Une table pour 6 personnes, totalement isolée par des voilages de fibres optiques et d'organza, donnant l'impression unique aux hôtes d'être seuls au monde. Parfois même un peu trop !
Une ambiance intime et conviviale
Ici l'ambiance se veut intime et conviviale à la mesure d'une demeure particulière.
Le ballet en noir et blanc du personnel (pour la plupart des "ducassiens") évolue en toute discrétion, avec gentillesse et professionnalisme, loin du service guindé habituel des grandes maisons. D'ailleurs son directeur, Christian Laval, ex Spoon de Paris, en tient les rênes avec élégance et simplicité. Même si le titre du restaurant peut prêter à confusion, pour Alain Ducasse, pas de malentendu. Le lieu se veut à mi chemin entre le Plaza Athénée et le Spoon. Un fine dining mais sans l'aspect apprêté et guindé d'un restaurant gastronomique. Pour preuve, le menu du déjeuner s'élève à 55 £, deux plats par personne.
Une carte contemporaine et créative
La carte est contemporaine, revisitée par le chef Jocelyn Herland (chef adjoint du Plaza) et adaptée pour le palais anglais, avec quelques spécialités connues d'Alain Ducasse comme ce suprême de volaille. Une combinaison très sophistiquée dans la sauce, mais un rendu unique, une finesse de saveurs qui explosent dans la bouche, sans en altérer le produit. Ou ce "velouté de châtaignes avec royale de foie gras". Beaucoup d'équilibre et d'originalité dans ce mélange savoureux et plein de légèreté. Sous la houlette de Gérard Margeon et d'HugueLepin, la carte des vins affiche un retour résolument français, avec de superbes bouteilles comme ce Château d'Yquem à 3700 £ mais aussi un excellent Clos Canarelli, vin Corse à 55 £ qui se déguste sans problème avec un goûteux "Baba comme à Monte Carlo, accompagné d'une crème fouettée à la vanille".
Au final, une carte qui reflète bien la créativité constante de ce chef qui n'en finit pas de nous surprendre !