Culture


Les palaces parisiens, une mémoire retrouvée

Les palaces parisiens, réputés pour leur luxe et aussi depuis quelques années pour leurs tables étoilées, se penchent sur leur histoire, racontée dans des ouvrages richement iconographiés, qui a épousé celle de Paris, dans son évolution architecturale, politique, financière et même sociale.
Deux de ces hôtels de luxe, le Plaza-Athénée et le Grand-Hôtel-Café de la Paix, viennent de publier des livres de grand format qui font plonger le lecteur dans l'histoire avec un grand "H", les petites histoires des grands de ce monde - dirigeants et stars - qui les ont fréquentés et celles des employés sans qui ils ne seraient pas des palaces.

L'historien Pascal Payen-Appenzeller fait ainsi découvrir aux éditions Assouline le Plaza-Athénée de l'avenue Montaigne, l'une des plus chics de la capitale, sous un jour jamais dévoilé, celui de modèle social depuis 1936.
Le "Plaza" a été le premier à rouvrir après la victoire du Front Populaire et des négociations avec la CGT, explique Pascal Payen-Appenzeller.
Au terme de la première "révolution sociale", les employés ont bénéficié notamment d'un service social, d'un service médical qui dispose de trois chambres au 7e étage, de cinq semaines de vacances, etc... Et si, en 1968, le personnel descend dans la rue, c'est pour protester contre la menace d'une vente de l'hôtel à un groupe anglais et la sauvegarde du luxe à la française.
L'auteur a interrogé 1.000 personnes, dont des enfants des fondateurs de l'hôtel, des anciens employés et le personnel actuel. Les stars en sont autant le chef concierge ou le chasseur que Jackie Onassis ou John Travolta.

Dans le livre publié aux éditions Italiques, Pascal Boissel s'attache moins aux personnels du Grand Hôtel-Café de la Paix, qui a rouvert l'an dernier après 18 mois de travaux, qu'à son histoire et celle de Paris ou de l'Opéra Garnier tout proche.
L'ouvrage qui porte sur "deux siècles de vie parisienne", rappelle que le palace a été voulu par Napoléon III, financé par les frères Péreire, inauguré en 1862 par la princesse Eugénie au cours d'un bal dont le chef d'orchestre n'était autre que Jacques Offenbach!
Les années suivantes seront aussi brillantes, le tout-Paris des arts, du spectacle et de la littérature se donnant rendez-vous au Grand Hôtel ou au Café de la Paix, de Sacha Guitry à Arthur Conan Doyle ou encore Edith Piaf.

Avenue George V ou Avenue Montaigne, les fortunes nobiliaires et les hôtels particuliers ont laissé la place au fil du temps aux banquiers puis à des grands groupes financiers. Les capitaux ne sont pas restés français, à l'exception notable du Crillon (groupe Taittinger). Ils sont devenus depuis longtemps européens (allemands au Bristol) mais aussi moyens-orientaux ou asiatiques (prince Al Waleed d'Arabie Saoudite pour le George V, sultanat du Brunei pour le Plaza).
En 1979, la presse s'était déchaînée après le rachat du Ritz, Place Vendôme par l'homme d'affaires londonien d'origine égyptienne Mohammed Al-Fayed, rappelait Claude Roulet, dans "Ritz, une histoire plus belle que la légende" publié en 1998, aux éditions Quai Voltaire/la Table ronde. Une campagne à la hauteur d'un établissement portant le nom d'un homme - César Ritz - qui avec son ami, le génial chef-cuisinier Auguste Escoffier, ont jeté les bases de l'hôtellerie et de la gastronomie modernes.

Présentation de l'éditeur
Le Plaza Athénée ouvre avenue Montaigne au lendemain de l'inauguration du théâtre des Champs-Elysées : l'hôtellerie de luxe épouse la grande cuisine incontournables des grands de ce monde. Mais en 1936, les innovations sociales vont aussi faire du Plaza Athénée un modèle inédit de collaboration entre la personnel et la direction. A partir de
documents et de témoignages inédits, cet ouvrage retrace les vies d'un hôtel mythique, grâce à ceux - concierges, directeurs, clients... - qui nous en racontent l'histoire.
Juin 2004
Par Yves CALMEJANE
Pascal Payen-Appenzeller est historien, professeur, chercheur et écrivain. Spécialiste de l'histoire de Paris et de
la société urbaine, il a co-écrit avec Jacques Hillairet et le Dictionnaire historique des rues de Paris. Pour
écrire l'histoire du Plaza Athénée, il a étudié et reconstitué les archives de l'hôtel pendant plus de deux ans.