Christophe Michalak, l’Ovni de la pâtisserie !
Bisounours en guimauve c’est lui, religieuse au caramel beurre salé, encore lui, macarons pêche Melba toujours lui ! Look décontracté et cool, en baskets, gourmand devant l’éternel et toujours la rage au ventre, Christophe Michalak, Chef Pâtissier de l'hôtel Plaza Athénée depuis l'année 2000, en est le consultant depuis 2010. Globe-trotter invétéré, Londres, Tokyo, New York, Bruxelles, Nice ont été des étapes cruciales qui, chacune à leur façon, ont forgé le pâtissier qu’il est à présent. Son métier lui permet d’ailleurs d’exprimer toute sa sensibilité à travers son talent. Une capacité de travail hors du commun le pousse, très jeune, à s’entraîner des heures durant et à se constituer une bibliothèque culinaire dès l’âge de 16 ans. Sa mémoire phénoménale fait le reste. Il décortique, analyse inlassablement toutes les recettes pour mieux les comprendre et cultiver sa mémoire gustative, outil essentiel du maître-pâtissier. C’est donc en se construisant dans l’adversité qu’il a trouvé son équilibre ! Discussion à bâtons rompus avec Katya Pellegrino !
Christophe Michalak
Qui êtes-vous Christophe Michalak ?
Né dans l’Oise à Senlis, j’ai été élevé dans l’amour des autres par ma mère aide-soignante avec qui j’ai développé un lien très fort. Je n’ai connu mon père qu’à l’âge de 7 ans car il ne m’avait pas reconnu à ma naissance. J’ai vécu alors jusqu’à 14 ans avec lui. Père absent, ses frasques et son comportement m’ont en fait permis d’être l’antithèse de cet homme. Ce en quoi quelque part je le remercie ! J’ai donc eu une enfance chaotique, mais ces turbulences m’ont été finalement bénéfiques. Gourmand, je souhaitais d’abord me tourner vers le dessin, mais la gourmandise a été la plus forte. Pourtant je ne peux pas dire que ma mère et ma grand-mère étaient des cuisinières hors pair (sourire) !
Christophe Michalak dans sa boutique du Marais
Le fait d’avoir un père absent vous a-t-il réellement permis de vous construire et d’avoir ce goût de revanche qui vous fait avancer ?
Oui. Nous l’avons suivi tout au long de ses déplacements. Père autoritaire, ce passage de vie avec lui m’a permis de me construire et de me forger un caractère trempé et combattif. Par son attitude, il m’a appris à me dépasser et à montrer ce dont je suis capable. Je suis volontaire et je travaille comme un laser ! Mon objectif a été de lui prouver que je pouvais être le numéro 1 dans mon domaine. Puis de 15 à 18 ans, j’ai vécu de nouveau seul avec ma mère en province vendéenne et pratiqué des sports de combat, judo, Kickboxing… qui m’ont permis de canaliser cette force, cette énergie et cette rage que j’avais en moi.
Un FantastiK chocolat/coco
Il semble que c’est votre enfance qui a forgé votre caractère. Pourquoi avoir voulu devenir pâtissier ?
Je ne voulais pas forcément devenir pâtissier, puisqu’à l’époque le métier de pâtissier n’existait pas. Comme j’aime les métiers de bouche, je fais un stage à l’âge de 15 ans dans une boulangerie. Là de nouveau, je tombe sur un tortionnaire et son attitude, loin de me décourager, me donne le déclic et l’envie, au contraire, de travailler dans la pâtisserie, mais dans l’élite ! Un autre stage à Cholet, puis direction Londres à 18 ans, avec 200 francs en poche et une bourse ridicule (ayant gagné le concours du Meilleur Apprenti). Là je travaille au Hilton durant un an et je découvre un nouvel horizon, moi le petit provincial !
Mon tournant….
Mon tournant, c’est ma rencontre au Negresco où je travaille à l’âge de 20 ans, avec Gregory Collet, Chef pâtissier, vrai professionnel dans son métier, qui m’a motivé pour passer les concours. Mon rêve était de travailler avec Pierre Hermé ! Rêve que je réaliserais quelque temps plus tard chez Fauchon, puis encore plus tard après le Japon pour aller travailler à New York dans un restaurant à Tribeca avec lui... La belle aventure du Plaza Athénée, viendra grâce à Jean-François Piège qui me parle d’Alain Ducasse. En 2000 je le rencontre et il me prend à l’essai durant 6 mois. Pendant 5 ans je devrais faire mes preuves, et en 2005 je gagne la Coupe du Monde de la Pâtisserie. Ce qui me permet ensuite de me m’exprimer totalement.
Sa création phare pour le Plaza : le "Red Power", litchi et framboises sur une base de financier
Quelle est la qualité première pour devenir un chef pâtissier comme vous ?
Il faut être gourmand, généreux et tourné vers les autres pour faire plaisir. J’ai eu la rage au ventre pour prouver que la pâtisserie est un vrai métier. N’oublions pas que dans les années 80, le métier de pâtissier était un métier précurseur. C’est à travers ma pâtisserie d’ailleurs, que j’exprime ma sensibilité. Il faut aussi avoir une mémoire culinaire et gustative importante et l’alimenter sans cesse. Cette immense mémoire culinaire, je ne cesse de l’auto-alimenter.
Les religieuses au caramel beurre salé
Comment un chef pâtissier peut-il se réinventer ?
Je définis ma pâtisserie en 4 mots : E pour Élégance, car une pâtisserie doit avoir de l’allure ! E pour Équilibre, un gâteau se construit sur ses saveurs et ses textures. E pour Émotion, car il faut y mettre du sentiment. E pour Efficacité (j’aime ce mot…sourire…).
Festival de gâteaux
Lorsque je pratiquais mes sports de combat, j’étais impressionnant par mes coups de pied, ma combativité. Un jour à mon tour, j’ai reçu un coup qui m’a fait très mal et décidé que personne n’avait le droit de me blesser. J’ai donc repris toute ma base de combat pour comprendre comment anticiper et avoir une méthode. C’est cette même méthode que j’applique dans la pâtisserie. Mon métier, je l’ai construit comme un dictionnaire. Je suis le « Wikipédia de la pâtisserie ». J’ai répertorié toutes les recettes de gâteaux, les ai analysées, disséquées, ce que je fais toujours et maintenant je sais instantanément si une recette est bonne ou non.
Jeux de couleurs et textures
Pourquoi avoir voulu créer une école de pâtisserie en 2013?
La Master Class
Je voulais créer un style qui me ressemble et qui soit différent des autres pâtisseries, car les petits gâteaux aujourd’hui ne sont plus de mise et surtout la majorité sont congelés pour être conservés. J’ai aussi voulu créer cette école pour transmettre et montrer que la pâtisserie est un véritable métier ! J’y donne un cours exclusif par semaine et nous réalisons 4 produits.
Avez-vous eu des mentors ?
3 personnes ont compté pour moi. Gaston Lenôtre qui a établi le « la » de la profession en renouvelant l’Art de la Pâtisserie ! Pierre Hermé, à mes yeux le Pâtissier Haute-Couture ! Philippe Conticini, le chef pâtissier de la Pâtisserie des Rêves, car nous avons le même alphabet. Ces trois personnes ont toutes apporté une plus-value dans la pâtisserie
Quelles sont les créations sur lesquelles vous travaillez ?
Une verrine KosmiK
Je crée des KosmiK, gâteaux avec 30% de moins de gras, de sucre et de gélatine. Mon 2ème produit phare le FantastiK, fait 3,5 cm de haut (conçu par rapport à la hauteur de l’ouverture de la bouche que j’ai mesuré) et 20 cm de diamètre (sourire).
Qu’est-ce qui est le plus difficile pour un chef pâtissier ?
De garder la ligne (sourire) !
Tartes au citron Yuzu meringuées
Vous êtes plutôt salé ou sucré ?
Sucré bien sûr ! Je suis gourmand et addict !
Et votre dessert préféré ?
Le flan, qui me rappelle mon enfance
Votre dernière ouverture ?
La boutique du Marais
Ma boutique au 16 rue de la Verrerie où l’on peut trouver des gâteaux au mètre et toutes mes créations.
Janvier 2017
Par Katya PELLEGRINO